A raison de son obligation de fidélité, le travailleur doit sauvegarder les intérêts légitimes de son employeur (art. 321a al. 1 CO) et par conséquent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice économiquement. Il ne doit pas faire concurrence à l’employeur pendant la durée du contrat (art. 321a al. 3 CO). L’obligation de fidélité complète l’obligation de travailler en ce sens qu’elle confère au travail un but, des objectifs: la défense des intérêts de l’employeur (ATF 140 V 521 consid. 7.2.1).
Le devoir de fidélité, sous son aspect positif, comprend un devoir d’information et de renseignements à charge du travailleur, qui l’astreint notamment à avertir l’employeur d’éventuels dommages imminents, des perturbations dans l’exécution du travail et d’autres irrégularités ou abus.
Le travailleur libéré de l’obligation de travailleur, à l’instar du recourant, reste tenu d’observer son devoir de fidélité envers son employeur (ATF 128 III 271 consid. 4a/bb).
Le respect du devoir de fidélité est apprécié avec une rigueur accrue pour les cadres supérieurs (ATF 127 III 86 consid. 2c p. 89).
Dans le cas d’espèce, le recourant (= employé) a reçu un courriel de l’ingénieur E.________, alors employé de l’intimée ( = employeur), l’informant que le prénommé et d’autres de ses collègues ingénieurs souhaitaient créer leur propre entreprise pour mettre sur le marché des machines industrielles qui feraient » directement » concurrence à celles développées par la demanderesse et consommeraient moins d’énergie; l’ingénieur y précisait que le projet était » avancé dans les idées « .
En cours d’instruction, le recourant a admis que le projet ainsi décrit dans le courriel faisait concurrence aux machines commercialisées par l’employeuse.
Le témoin O.________, directeur général d’une société allemande concurrente de l’intimée, lequel avait été approché par un des ingénieurs de celle-ci, a du reste confirmé que lesdits ingénieurs souhaitaient faire concurrence à leur employeuse.
Il n’est nul besoin de longues explications pour admettre que le recourant, averti que plusieurs des collaborateurs de l’intimée entendaient faire concurrence à celle-ci sur le marché des machines industrielles, devait signaler à l’employeuse qu’elle était menacée d’un dommage économique imminent.
L’activité des ingénieurs était évidemment illicite, étant donné qu’ils consacraient notamment une partie de leurs heures de travail à créer des machines pour leur propre compte et qu’ils ne mettaient donc pas toutes leurs forces au service de l’intimée, ce qui constituait une violation flagrante de leur obligation de fidélité résultant des relations de travail qu’ils avaient nouées avec l’employeuse.
Et le projet n’était pas dans les limbes puisqu’il était » avancé au sein de l’équipe « , ainsi que l’avait mentionné E.________ au recourant.
Il suit de là que, du fait de son silence, le recourant, durant le délai de congé, a violé son devoir de fidélité au sens de l’art. 321a CO.
(Arrêt du Tribunal fédéral 4A_297/2016 du 17 novembre 2016)
Me Philippe Ehrenström, avocat, ll.m., Genève – Yverdon