La question ne découle pas d’un paradoxe après le NON sec et sonnant du peuple et des cantons à l’initiative de la gauche demandant l’instauration au niveau fédéral d’un salaire minimum.
En effet, le 28 mai 2014, soit quelques jours après le refus de l’introduction d’un salaire minimum fédéral, le Grand Conseil neuchâtelois approuvait l’introduction d’un salaire minimum étatique cantonal.
Le Professeur Laurent Bieri (Le salaire minimum neuchâtelois, in: Jusletter 11 août 2014) rappelle d’abord que le principe d’un salaire minimum cantonal figure dans la constitution neuchâteloise (art. 34a), modification constitutionnelle qui a reçu la garantie de la Confédération. Celle-ci avait précisé à cette occasion que les compétences fédérales en matière de droit du travail avaient été largement utilisées mais qu’elles laissaient subsister des compétences cantonales, et notamment la possibilité d’édicter des normes sur le salaire minimal pour des motifs de police ou de politique sociale.
L’art. 34a respectait aussi la garantie de la liberté économique (art. 27 de la Constitution fédérale) dans la mesure où la restriction en cause était inscrite dans une base légale formelle, visait un intérêt public de politique sociale et était proportionnée (fixation du montant du salaire minimum par le législateur cantonal en tenant compte des secteurs économiques et des conventions collectives).
Les art. 32a et ss. nouveaux de la loi neuchâteloise sur l’emploi et l’assurance-chômage (LEmpl) concrétisent donc l’art. 34a de la Constitution cantonale. La modification a été publiée le 13 juin 2014, un référendum apparaissant peu probable.
Le salaire minimum sera en conséquence, à Neuchâtel, de Frs. 20.– de l’heure, avec des exceptions possibles, par exemple en matière de formation ou d’intégration professionnelle.
Une telle mesure de politique sociale, si elle paraît donc « jouable » juridiquement au niveau cantonal, laisse toutefois ouvertes certaines questions d’opportunité et/ou d’utilité, dont la plus importante tient à la multiplication des seuils, garanties, minimums, paliers, etc. en droit du travail suisse.