Le travailleur qui a l’exercice des droits civils peut s’engager par écrit envers l’employeur à s’abstenir après la fin du contrat de lui faire concurrence de quelque manière que ce soit, notamment d’exploiter pour son propre compte une entreprise concurrente, d’y travailler ou de s’y intéresser (art. 340 al. 1 CO).
La prohibition de faire concurrence cesse si le travailleur résilie le contrat pour un motif justifié imputable à l’employeur (art. 340c al. 2 CO).
La notion de motif justifié n’est pas identique à celle de justes motifs selon l’art. 337 CO. Il suffit que le motif de la résiliation puisse être considéré comme objectivement raisonnable, même s’il ne s’agit pas d’une violation du contrat par l’autre partie. Constituent des motifs justifiés de démission, par exemple, un salaire notablement inférieur au marché, une surcharge de travail chronique malgré des protestations du salarié, des reproches incessants ou un mauvais climat dans l’entreprise.
Dans le cas d’espèce, l’appelant (= l’employé) prétend que la clause de non-concurrence avait cessé de déployer ses effets, dans la mesure où il avait donné sa démission pour un motif justifié imputable à son employeur.
L’appelant reproche en premier lieu à son ancien employeur de ne pas lui avoir assuré de promotion particulière durant les dernières années qu’il avait passées au sein de B______ (=l’employeur). Cette critique tombe à faux, dans la mesure où un employé ne saurait se prévaloir d’un droit à une promotion. Il ressort par ailleurs du dossier que l’appelant a été engagé par B______ en 2004 en qualité de conseiller en personnel, pour un salaire mensuel brut de 5’500 fr. Au début de l’année 2008, A______ est devenu « branch manager », puis « branch director » dès le 1er janvier 2010, son salaire mensuel s’étant élevé en dernier lieu à 7’600 fr. Il est par conséquent établi que l’appelant a bénéficié, durant les dix années passées au sein de B______, de promotions régulières et d’une revalorisation conséquente de son salaire.
L’appelant n’a pour le surplus ni démontré, ni même allégué, avoir brigué, peu avant sa démission, une promotion qui lui aurait été refusée de manière injustifiée. Le prétendu manque d’intérêt de son supérieur hiérarchique à l’égard du projet de développement des activités de l’appelant n’a pas été instruit, A______ ayant renoncé à faire entendre des témoins en première instance.
Il n’est dès lors pas établi que B______ aurait refusé pour de mauvaises raisons et injustement le projet de l’appelant.
Ce dernier se prévaut également des licenciements survenus au sein de B______, sans démontrer toutefois qu’il aurait personnellement fait l’objet d’une rupture de contrat dans un proche avenir; son argumentation sur ce point est dès lors infondée.
L’appelant se prévaut enfin de la note rédigée par J______, son supérieur hiérarchique. Cette note, dont le destinataire n’est pas connu, atteste certes du fait que l’opinion de J______ au sujet de l’appelant n’était pas totalement favorable. L’appelant n’a toutefois ni démontré, ni même allégué que son supérieur se serait montré désagréable ou injustement critique à son égard, étant relevé de surcroît que J______ s’apprêtait à quitter B______, ayant atteint l’âge de la retraite.
C’est dès lors à tort que l’appelant tente de se prévaloir de l’art. 340c al. 2 CO.
(CAPH/118/2016, consid. 3)
Me Philippe Ehrenström, avocat, ll.m., Genève – Yverdon