A.________, ressortissant suisse, né en 1944, est titulaire d’un diplôme de médecine depuis1970 ainsi que d’un titre de médecin spécialiste en médecine interne générale depuis 1980, respectivement d’une formation approfondie interdisciplinaire en médecine du sport et de l’exercice depuis 1999. Par arrêté du 19 novembre 1976 du Conseil d’Etat neuchâtelois, il a été autorisé à pratiquer dans le canton en qualité de médecin.
Par décision du 18 avril 2023, l’autorisation de pratiquer dans le canton, en qualité de médecin, délivrée au prénommé a été renouvelée jusqu’au 30 août 2024. Ce prononcé, qui n’a pas été contesté, précisait que, conformément à l’article 57 LS, l’autorisation ne pourrait pas être renouvelée.
Par courrier du 4 juin 2024, l’intéressé a adressé au Service de la santé publique (ci-après : SCSP) une demande de prolongation au moins jusqu’à la fin de l’année 2024 de son droit de pratiquer la médecine dans le canton de Neuchâtel. À l’appui de sa demande, il indiquait suivre régulièrement des cours de formation continue, exercer à un taux de 60 %, recevoir en moyenne entre 170 et 180 patients par mois, et prendre en charge environ 2’000 patients par an. Il exprimait également ses préoccupations concernant la pénurie de médecins généralistes et formulait ainsi l’espoir que la limite absolue de 80 ans fixée par la LS serait abrogée dans les meilleurs délais.
Par décision du 13 août 2024, le DSRS n’a pas autorisé l’intéressé à pratiquer dans le canton en qualité de médecin au-delà du 30 août 2024, au motif qu’il atteindrait la limite d’âge légal de 80 ans de l’article 57 LS à cette date.
Le 15 août 2024, A.________ interjette recours devant la Cour de droit public du Tribunal cantonal contre ledit prononcé du département.
Sur le fond, le recourant affirme qu’en adoptant l’article 36 LPMéd, la Confédération a réglé exhaustivement les conditions d’exercice des professions médicales. Il en conclut que l’article 57 al. 1 LS, en vertu duquel l’autorisation de pratiquer la médecine n’est pas renouvelable au-delà de 80 ans, violerait la primauté du droit fédéral (art. 49 al. 1 Cst. féd.) et serait disproportionnée (art. 36 Cst. féd.).
La LPMéd a notamment pour but d’établir les règles régissant l’exercice des professions médicales universitaires sous propre responsabilité professionnelle (art. 1 al. 3 let. e et 2 al. 1 let. a). Aux termes de l’article 34 LPMéd, l’exercice d’une profession médicale universitaire sous propre responsabilité professionnelle requiert une autorisation du canton sur le territoire duquel la profession médicale est exercée. L’article 36 LPMéd précise que l’autorisation de pratiquer, sous propre responsabilité professionnelle, est octroyée si le requérant est titulaire du diplôme fédéral correspondant, respectivement est digne de confiance et présente, tant physiquement que psychiquement, les garanties nécessaires à un exercice irréprochable de la profession, ainsi que dispose des connaissances nécessaires dans une langue officielle du canton pour lequel l’autorisation est demandée (al. 1). Toute personne qui veut exercer la profession de médecin, de chiropraticien ou de pharmacien sous sa propre responsabilité professionnelle doit, en plus, être titulaire du titre postgrade fédéral correspondant (al. 2). Cette disposition règle exhaustivement les conditions professionnelles et personnelles posées à l’octroi de l’autorisation de pratiquer, les cantons n’étant pas habilités à en ajouter d’autres. Les cantons peuvent toutefois prévoir que l’autorisation de pratiquer sous propre responsabilité professionnelle soit soumise à des restrictions professionnelles, temporelles ou géographiques ainsi qu’à des charges pour autant que ces restrictions et ces charges soient imposées par la Confédération ou qu’elles soient nécessaires pour garantir la fiabilité des soins médicaux et leur qualité (art. 37 LPMéd). L’autorisation est retirée si les conditions de son octroi ne sont plus remplies ou si l’autorité compétente constate, après l’octroi de l’autorisation, des faits sur la base desquels celle-ci n’aurait pas dû être délivrée (art. 38 al. 1 LPMéd). Il s’agit là d’une mesure administrative, d’un retrait « de sécurité ».
Sur le plan cantonal, selon l’article 54 LS, toute personne qui entend exercer une profession dans le domaine de la santé au sens de l’article 52 LS doit être au bénéfice d’une autorisation délivrée par le département ou par le service (cf. aussi art. 1a du règlement concernant l’exercice des professions médicales universitaires et des autres professions de la santé du 02.03.1998 [RSN 801.100]). A titre de conditions personnelles, l’article 56b LS prévoit que, pour toutes les professions du domaine de la santé, l’autorisation ne peut être délivrée que si la personne est digne de confiance et présente, tant physiquement que psychiquement, les garanties nécessaires à un exercice irréprochable de la profession, respectivement dispose des connaissances nécessaires du français. L’autorisation est valable jusqu’à l’âge de 70 ans ; elle est ensuite renouvelable pour une période de trois ans, puis d’année en année jusqu’à 80 ans ; un certificat médical doit être joint à la demande de renouvellement (art. 57 al. 1 LS). Le département est compétent pour soumettre l’autorisation d’exercer à d’autres restrictions temporelles, géographiques ou techniques ainsi qu’à des charges, pour autant qu’elles soient nécessaires pour garantir des soins médicaux fiables et de qualité (art. 57 al. 2 LS). L’autorisation est retirée si les conditions de l’octroi ne sont plus remplies ou si le département constate, sur la base d’évènements survenus après l’octroi de l’autorisation, que celle-ci n’aurait pas dû être délivrée (art. 57a al. 1 LS). Le retrait peut porter sur une partie ou sur la totalité de l’autorisation, définitivement ou pour un temps déterminé (art. 57a al. 2 LS).
Selon l’art. 49 al. 1 Cst. féd., le droit fédéral prime le droit cantonal qui lui est contraire. Ce n’est que lorsque la législation fédérale exclut toute réglementation dans un domaine particulier que le canton perd toute compétence pour adopter des dispositions complétives, quand bien même celles-ci ne contrediraient pas le droit fédéral ou seraient même en accord avec celui-ci.
En l’espèce, n’est pas discutée la question de savoir si le recourant dispose toujours des connaissances, aptitudes et capacités spécifiques à la pratique de la médecine, respectivement, s’il est encore capable de mettre en application les compétences nécessaires à cette pratique, ainsi que de continuer de les approfondir, développer et améliorer, et ce afin de garantir des soins médicaux fiables et de qualité. Tout au plus se limitera-t-on à relever que les écrits de ses patients soulignent, en substance, ses compétences humaines et professionnelles, et le certificat médical établi le 2 juillet 2024 par le Dr C.________ atteste de ses capacités physiques et cognitives à poursuivre ses activités de médecin généraliste et du sport. Ceci étant, ces éléments ne revêtent aucune pertinence ici ; le non-renouvellement de l’autorisation de pratiquer dans le canton de Neuchâtel, au-delà du jour où l’intéressé a fêté ses 80 ans, soit le 30 août 2024, est uniquement justifié par l’application de l’article 57 LS ; disposition aux termes de laquelle, l’autorisation est valable jusqu’à l’âge de 70 ans, étant précisé qu’elle est ensuite renouvelable pour une période de trois ans, puis d’année en année jusqu’à 80 ans (al. 1), le département étant par ailleurs compétent pour soumettre l’autorisation d’exercer à d’autres restrictions temporelles, géographiques ou techniques ainsi qu’à des charges, pour autant qu’elles soient nécessaires pour garantir des soins médicaux fiables et de qualité (al. 2).
On rappellera que l’article 37 LPMéd stipule que les cantons peuvent prévoir que l’autorisation de pratiquer sous propre responsabilité professionnelle soit soumise à des restrictions professionnelles, temporelles ou géographiques ainsi qu’à des charges pour autant que ces restrictions et ces charges soient imposées par la Confédération ou qu’elles soient nécessaires pour garantir la fiabilité des soins médicaux et leur qualité. Cette latitude est confirmée par le message du Conseil fédéral en ce qui concerne la limitation temporelle, qui indique que les cantons peuvent décider d’appliquer des autorisations à durée limitée (FF 2005 157 précitée, spéc. ad art. 37 LPMéd, p. 210). A noter que si, dans un avis du 27 mai 2015 faisant suite à une interpellation parlementaire du 19 mars 2015 concernant l’âge limite pour les médecins dont le domaine de spécialisation est particulièrement sensible, le Conseil fédéral a fait savoir qu’il estimait « qu’il est peu judicieux de fixer un âge limite précis parce que l’évolution de la santé et le développement des compétences techniques sont spécifiques à chaque médecin », l’article 36 al. 1 let. b LPMéd expose que l’autorisation de pratiquer ne peut être octroyée que si le requérant est non seulement digne de confiance, mais également pour autant qu’il présente, tant physiquement que psychiquement, les garanties nécessaires à un exercice irréprochable de la profession. Cela étant, il a souligné que l’article 37 LPMéd donne la possibilité d’octroyer une autorisation à titre temporaire, possibilité dont ont fait usage plusieurs cantons (Interpellation parlementaire 15.3200 du 19.03.2015 relative à la limite d’âge pour les médecins dont le domaine de spécialisation est particulièrement sensible). C’est également le lieu de rappeler que, dans un arrêt concernant l’âge limite pour exercer des notaires ancré dans la loi cantonale, le Tribunal fédéral a admis que, pour remédier à un risque d’altération, à partir d’un certain âge, des facultés intellectuelles, physiques ou mentales, de même que de l’aptitude à s’adapter aux conditions nouvelles ainsi qu’à l’évolution des connaissances et de la technique, soit au risque que ces capacités soient diminuées au point de ne plus être compatibles avec la sécurité et la confiance s’imposant, plusieurs systèmes étaient concevables. En particulier, il pouvait être opté pour une méthode subjective, consistant à examiner de cas en cas, périodiquement à partir d’un certain âge, si les intéressés peuvent continuer à exercer leur charge – méthode a priori préférée par le Conseil fédéral dans son avis du 27 mai 2015 – ou choisir une méthode objective, consistant à appliquer à tous une limite unique (ATF 124 I 297 cons. 4c). Le canton de Neuchâtel a opté pour une solution comprenant ces deux méthodes en adoptant l’article 57 LS.
Si le Tribunal fédéral ne s’est pas expressément prononcé sur la possibilité donnée aux cantons par l’article 37 LPMéd d’octroyer une autorisation à titre temporaire et, donc, en particulier de fixer un âge limite précis, il a toutefois eu l’occasion de juger, dans le cas d’une suspension professionnelle d’un médecin-psychiatre âgé de 67 ans exerçant à Genève, canton qui connaît une disposition relativement proche de celle de l’article 57 LS (cf. art. 78 LS/GE ; RSGE K 1 03), qu’une interdiction de pratiquer d’une durée de deux ans touchera moins durement ledit praticien qu’elle ne le ferait pour un jeune médecin dès lors qu’il devra de toute manière prochainement mettre fin à son activité médicale. La Haute Cour a encore précisé que l’âge du psychiatre concerné implique que les patients qu’il suit à l’heure actuelle, soit une centaine de personnes selon ses propres allégations, savent qu’ils devront prochainement trouver un autre thérapeute, de sorte que l’interdiction de pratiquer prononcée à l’encontre de ce médecin avancera tout au plus le moment où ils devront entreprendre cette démarche (arrêt du TF du 07.05.2013 [2C_66/2013] cons. 7.4). Quand bien même le Tribunal fédéral n’a pas explicitement examiné la constitutionnalité de la disposition genevoise, force est de constater qu’il n’a rien trouvé à redire à son propos. Il en va de même dans un cas valaisan, canton ayant une disposition similaire à celle du canton de Genève (arrêt du TF du 22.11.2012 [2C_500/2012] cons. 3.5.3).
Plus récemment, dans une affaire tessinoise, à laquelle se réfère le recourant, portant sur l’autonomie dans une deuxième langue nationale pour pratiquer une profession médicale universitaire régie par la LPMéd, la Haute Cour a retenu qu’il était contraire au droit fédéral d’exiger, comme condition à l’octroi d’une autorisation de pratiquer la médecine, un certificat B1, selon les normes internationales (arrêt du TF du 12.05.2020 [2C_850/2018] cons. 8.5). Le Tribunal fédéral procédant à un contrôle abstrait de l’article 56 al. 2 de la loi sur la santé tessinoise (RST 801.100 ; LSan/TI), a tout d’abord rappelé que dans le cadre d’un tel contrôle, l’annulation d’une disposition cantonale se justifiait uniquement si aucune interprétation conforme au droit constitutionnel ou au droit fédéral n’était possible (cf. cons. 3.2). Se référant ensuite à la jurisprudence rendue en la matière (ATF 143 I 352 cons. 3.1 ; arrêt du TF du 27.03.2018 [2C_782/2017] cons. 2.1), il a confirmé que la compétence pour accorder l’autorisation d’exercer incombait aux cantons, mais que les conditions professionnelles et personnelles nécessaires à son obtention étaient limitativement réglementées par le droit fédéral (art. 36 LPMéd), de sorte que les cantons ne pouvaient pas en ajouter d’autres (cf. cons. 6.2). Il a précisé que l’exigence d’autonomie dans une seconde langue nationale n’était pas couverte par l’article 37 LPMéd, celui-ci permettant aux cantons de soumettre l’autorisation d’exercer à d’autres restrictions temporelles, géographiques ou techniques ainsi qu’à des charges, pour autant qu’elles soient nécessaires pour garantir des soins médicaux fiables et de qualité. Le Tribunal fédéral a indiqué que l’article précité se référait aux restrictions de nature technique (limitation à un secteur spécifique ou à des activités médicales spécifiques), temporelle (en particulier, une autorisation à durée limitée) ou géographique (limitation à une commune déterminée en cas de couverture insuffisante des soins médicaux conformément à l’art. 36 al. 3 let. b LPMéd). Il a encore relevé que, s’agissant de l’exigence d’autonomie dans une seconde langue nationale, l’article 11a de l’ordonnance du 27 juin 2007 sur les professions médicales (RS 811.112.0 ; ci-après : OPMéd) prévoit que toute personne exerçant une profession médicale universitaire doit au moins être en mesure, dans la langue dans laquelle elle exerce sa profession, de comprendre les points essentiels de textes complexes consacrés à des sujets concrets ou abstraits ; elle doit être capable de participer à des discussions dans son propre domaine et de s’exprimer spontanément et couramment sur ce sujet, de manière à ce que l’échange dans la langue principale de l’interlocuteur se déroule sans problème pour les deux parties. La Haute Cour a ainsi souligné que cette disposition ne fait référence qu’à une seule langue, et non à deux.
Quant à la doctrine, dont se prévaut le recourant, elle ne semble pas unanime sur la question de savoir si les cantons sont en droit de fixer une limite d’âge (…)
Le recourant se réfère aux considérations émises par le Tribunal fédéral dans l’affaire tessinoise susmentionnée pour tenter de les appliquer mutatis mutandis à son cas. Plus exactement, il estime que, si l’exigence d’autonomie dans une seconde langue nationale a été considérée comme contraire au droit fédéral, alors la fixation d’une limite d’âge absolue pour exercer une profession médicale universitaire régie par la LPMéd le serait également. S’il convient d’admettre que l’article 36 LPMéd régit de manière exhaustive les conditions professionnelles et personnelles pour l’octroi de l’autorisation de pratiquer, la fixation d’une limite d’âge absolue ne relève pas de cette disposition, mais bien de l’article 37 LPMéd. Le recourant ne saurait dès lors être suivi lorsqu’il soutient que, compte tenu du caractère exhaustif de l’article 36 LPMéd, la limite d’âge de l’article 57 al. 1 LS serait contraire au droit fédéral. L’exigence d’autonomie dans une seconde langue nationale de l’article 56 al. 2 LSan/TI, disposition portant sur les conditions requises pour l’octroi de l’autorisation et donc s’inscrivant dans le cadre de l’article 36 LPMéd, n’est en effet pas à confondre avec la limite d’âge absolue de 80 ans de l’article 57 al. 1 LS), soit une restriction temporelle d’exercice entrant dans le cadre des prérogatives dévolues aux cantons conformément à l’article 37 LPMéd. Comme déjà dit, cette disposition laisse une certaine latitude aux cantons, en leur permettant de prévoir des restrictions professionnelles, temporelles ou géographiques ainsi que des charges pour autant que ces restrictions et ces charges soient en particulier nécessaires pour garantir la fiabilité des soins médicaux et leur qualité. Or, force est de constater – comme l’a déjà retenu la Cour de droit public (RJN 2023, p. 523) – que la limite d’âge fixée à l’article 57 LS vise à assurer tout particulièrement la sécurité et la confiance, non seulement en prévenant une mise en danger abstraite des patients, soit en protégeant la patientèle d’éventuelles erreurs futures d’un médecin, mais également en veillant à la crédibilité du système de santé en garantissant la fiabilité des soins médicaux et leur qualité (cf. art. 37 in fine LS). On rappellera que le Tribunal fédéral a déjà admis que plusieurs systèmes, dont la méthode objective de la limite d’âge unique, étaient concevables pour remédier à un risque d’altération, à partir d’un certain âge, des facultés intellectuelles, physiques ou mentales, de même que de l’aptitude à s’adapter aux conditions nouvelles ainsi qu’à l’évolution des connaissances et de la technique, soit au risque que ces capacités soient diminuées au point de ne plus être compatibles avec la sécurité et la confiance s’imposant. À noter encore que la limite d’âge querellée ne constitue pas, contrairement à l’article 56 al. 2 let. a LSan/TI, une condition supplémentaire, à celles de l’article 36 LPMéd, pour l’octroi initial de l’autorisation de pratiquer la médecine ; elle concerne uniquement son renouvellement au-delà d’un certain âge. En définitive, contrairement à l’opinion du recourant, les considérations émises par le Tribunal fédéral dans la cause tessinoise ne peuvent être appliquées à son cas ; l’article 57 LS ne viole pas le principe de la force dérogatoire du droit fédéral ; cette disposition complétive, qui s’inscrit dans la latitude laissée aux cantons par l’article 37 LPMéd, vient renforcer l’efficacité de la réglementation fédérale, puisque – comme exposé ci-avant – elle vise avant tout à assurer la sécurité et la confiance, ainsi qu’à garantir la fiabilité des soins médicaux et leur qualité.
Comme tout droit fondamental, la restriction à l’exercice de la profession de médecin, qui limite la liberté économique de l’intéressé, est admissible, pour autant qu’une telle restriction soit fondée sur une base légale, repose sur un intérêt public ou sur la protection d’un droit fondamental d’autrui et soit proportionnée au but visé (art. 36 Cst. féd.) La mise en œuvre du principe de proportionnalité pourrait imposer de conditionner l’autorisation de pratiquer à des clauses accessoires au sens de l’article 37 LPMéd, dans la mesure où cela s’avérerait possible, plutôt que de la retirer ou alors limiter l’autorisation d’exercer à certaines activités (cf. arrêt du TF du 06.09.2016 [2C_630/2016] relatif à une décision incidente sur l’effet suspensif : le chirurgien en cause, qui avait commis une erreur médicale, puis rédigé des rapports médicaux erronés, s’était vu interdire les actes de chirurgie, mais avait été autorisé à continuer à procéder à des consultations durant la procédure à son encontre). Il convient donc de déterminer si la limite absolue de 80 ans, fixée par l’article 57 al. 1 LS, en conformité avec l’article 37 LPMéd, répond aux exigences de sécurité tout particulièrement des patients ou si une mesure moins contraignante pourrait suffire à atteindre cet objectif. (…)
(…) dans le cadre de la pesée des intérêts en présence qu’il convient d’effectuer pour vérifier le caractère raisonnable de la mesure, la Cour de céans doit accorder un certain poids aux intérêts de la patientèle, dont la sécurité peut être sensiblement entravée par un risque d’altération, à partir d’un certain âge, des facultés des médecins pratiquant dans le canton. De même, elle doit, de manière plus large, tenir compte de la sécurité du système de santé et de la confiance en ce dernier que doit pouvoir placer la collectivité publique, ainsi qu’in fine ne pas omettre l’intérêt à la fiabilité des soins médicaux et à leur qualité. Ceci étant, elle doit aussi prendre en considération les intérêts de la personne visée par la limitation d’âge fixée par la loi. À cet égard, le recourant, qui ne se prévaut d’ailleurs pas en tant que tel de sa propre liberté économique, ne peut invoquer un intérêt privé prépondérant à continuer la pratique de la médecine. On rappellera à cet égard qu’il a été explicitement informé, par décision du 18 avril 2023 déjà, que son autorisation de pratiquer ne serait pas renouvelée au-delà du 30 août 2024, compte tenu précisément de la limite d’âge absolue de l’article 57 LS. Or, alors qu’il n’a pas recouru contre ce prononcé, il n’a pris aucune mesure pour rediriger sa patientèle, ce qui lui appartient et est de sa responsabilité. Il a attendu le mois de juin 2024, soit deux mois avant l’expiration de son autorisation, pour déposer une demande de prolongation, dépourvue qui plus de tout certificat médical, alors qu’il ne pouvait ignorer qu’elle lui serait refusée. Le comportement du recourant, visant à placer les autorités devant le fait accompli, est discutable. À noter que le SCSP lui a proposé de l’aider à trouver une solution pour sa patientèle en le mettant en relation avec des médecins récemment installés.
En définitive, pas plus que lorsqu’il soutient que la fixation d’une limite d’âge absolue à 80 ans violerait la primauté du droit fédéral, on ne saurait suivre le recourant lorsqu’il prétend que l’article 57 LS, en vigueur depuis le 1er janvier 2009, serait contraire à la Constitution fédérale, en particulier à son article 36. (…)
(Arrêt de la Cour de droit public du Tribunal cantonal neuchâtelois CDP.2024.211du 24.09.2024 ; un recours au TF est pendant)
Me Philippe Ehrenström, avocat, LLM
