Smart Metering: installation de compteurs d’eau électroniques

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J’ai déjà souligné ici l’intérêt des jurisprudences suisse et étrangères en matière d’installation de compteurs d’eau intelligents, qui sont tout à fait transposables aux compteurs électriques. (Voir mon article dans Europ’ Energies p.ex. : https://www.linkedin.com/posts/philippe-ehrenstr%C3%B6m-5b660329_smart-metering-et-protection-des-donn%C3%A9es-activity-7106975273748717568-QDob?utm_source=share&utm_medium=member_desktop)

Dans un arrêt du Bayerischer Verwaltungsgerichtshof (VGH) 4 ZB 23.1056 du 4 septembre 2023 la juridiction administrative d’appel s’est penchée sur le droit d’opposition des personnes concernées à des actes préparatoires à l’installation de compteurs d’eau intelligents (arrêt présenté et traduit par « Lacrosse » sur le gdprhub – https://gdprhub.eu/index.php?title=VGH_M%C3%BCnchen_-_4_ZB_23.1056&mtc=today – avec le texte original : https://www.gesetze-bayern.de/Content/Document/Y-300-Z-BECKRS-B-2023-N-26263):

Les personnes concernées sont les copropriétaires d’une propriété comprenant deux unités résidentielles avec un total de six résidents. Un compteur d’eau a été installé à l’intérieur de leur maison afin d’enregistrer la consommation totale d’eau de la propriété. La validité de l’étalonnage du compteur d’eau a expiré en 2020. Le contrôleur est une association municipale à but spécifique qui exploite un système public d’approvisionnement en eau. Le comité de l’association a décidé en 2019 de remplacer les compteurs d’eau analogiques installés par des compteurs d’eau électroniques équipés de modules radio – qui peuvent être relevés à distance.

L’association municipale à but spécifique a informé les personnes concernées de la période d’étalonnage et du remplacement prévu du compteur d’eau. Celles-ci ont refusé l’accès à leur propriété et se sont opposées à l’installation d’un compteur d’eau électronique doté d’un module radio, en invoquant leur droit d’opposition en vertu de l’article 21, paragraphe 1, du RGPD. Par le biais d’une notification, le responsable du traitement a décidé d’obliger les personnes concernées à permettre à l’un de ses employés d’accéder au compteur d’eau, en précisant qu’en cas de non-respect de cette obligation, il infligerait une amende. Le responsable du traitement a fait valoir, entre autres, que les conditions d’opposition prévues par le RGPD n’étaient pas remplies. Les personnes concernées ont toutefois continué à refuser l’accès à leur propriété et ont intenté une action en justice contre la décision du responsable du traitement pour violation de leurs droits fondamentaux et de leur droit à la vie privée.

Le tribunal administratif de Bayreuth (VG Bayreuth) a estimé que l’avis de l’association municipale à but spécial était fondé sur les statuts régissant l’installation publique de distribution d’eau. L’installation de compteurs d’eau électroniques ne violait pas leurs droits fondamentaux à l’autodétermination informationnelle ou à l’inviolabilité du domicile, inscrits dans la Constitution de la République fédérale d’Allemagne. Elle ne violait pas non plus les dispositions du RGPD. Pour ces raisons, le VG a débouté les personnes concernées, qui ont fait appel auprès du VGH.

Le VGH a estimé que les volumes de consommation d’eau enregistrés par ces compteurs d’eau électroniques peuvent, dans certaines circonstances, constituer des données à caractère personnel des résidents. C’est le cas, par exemple, lorsque ces compteurs permettent d’analyser les habitudes de consommation personnelle d’une personne concernée.

Toutefois, en l’espèce, le législateur avait expressément autorisé l’utilisation de compteurs d’eau électroniques dotés de modules radio à l’article 24, paragraphe 4, du code municipal de l’État libre de Bavière.

Le VGH a donc estimé que la fourniture d’eau potable au moyen de compteurs d’eau, en tant que mission d’intérêt public, constituait un traitement licite de données à caractère personnel sur la base de l’article 6, paragraphe 1, point e), RGPD, et que l’exigence de l’article 6, paragraphe 3, point b), du RGPD était également satisfaite.

Le VGH a également estimé que le passage des compteurs d’eau analogiques aux compteurs à distance était proportionné à l’objectif poursuivi, car il permettait d’améliorer la qualité des mesures de la consommation en général.

En outre, le VGH a précisé que le droit d’opposition prévu à l’article 21, paragraphe 1, du RGPD concerne le traitement des données à caractère personnel de la personne concernée. En l’espèce, les simples mesures préparatoires à l’utilisation d’un compteur d’eau, telles que son installation, ne constituent pas un traitement de données à caractère personnel.

Par conséquent, le VGH a rejeté le recours.

Me Philippe Ehrenström, avocat, LLM, CAS, Genève et Onnens (VD)

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Ce blog présente certains thèmes juridiques en Suisse ainsi que des questions d'actualité. Il est rédigé par Me Philippe Ehrenström, avocat indépendant, LL.M., Yverdon-les-Bains
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