Il convient de différencier les heures supplémentaires du solde positif accumulé dans le cadre d’un horaire de travail flexible (gleitende Arbeitszeit). Cette hypothèse vise les employeurs qui octroient une certaine flexibilité à leurs travailleurs dans l’organisation de leur horaire de travail, pour autant qu’ils soient présents à certaines périodes bloquées et qu’ils respectent globalement, pendant la période de référence convenue, la durée du travail fixée. En contrepartie de l’autonomie qui leur est concédée, les employés doivent spontanément compenser par un congé le solde positif d’heures accumulé pendant l’exécution du travail. Il est donc difficile dans ce système de parler d’heures supplémentaires, parce que le travailleur est censé fournir un nombre d’heures défini sur une période donnée et qu’il s’organise librement pendant cette période pour récupérer les heures accumulées en trop. Ce n’est donc que dans des circonstances exceptionnelles que le travailleur pourra, dans cette hypothèse, demander la compensation d’heures supplémentaires, par exemple quand les besoins de l’entreprise ont rendu pratiquement impossible pendant la période considérée la compensation d’un solde d’heures avec du temps libre.
Dans un cas d’espèce, l’employé bénéficiait d’un horaire de travail différent de celui prévu dans le règlement du personnel. Il ressort en effet des témoignages recueillis que s’il devait accomplir 8 heures de travail par jour, il pouvait en revanche librement organiser ses horaires ainsi que ses journées de travail. Il décidait ainsi du lieu et de la date de ses voyages ainsi que de l’heure de ses rendez-vous. En outre, lorsqu’il était présent au sein de la société, il ne se conformait pas nécessairement aux horaires définis dans le règlement, commençant parfois sa journée à 9h15 et prenant, de temps à autre, une pause de 30 minutes. Compte tenu de l’autonomie dont il disposait, il y a lieu de retenir qu’il était de sa responsabilité de définir son horaire de travail journalier ainsi que d’organiser ses rendez-vous et ses voyages à l’étranger de façon à ne pas devoir effectuer des heures supplémentaires. Or, il n’apparaît pas qu’il l’ait fait puisqu’il a systématiquement comptabilisé comme heures supplémentaires les heures accomplies avant 9 heures et après 18 heures et qu’il a, à plusieurs reprises, voyagé les week-ends ou durant des jours fériés. Or l’employé ne peut prétendre à une indemnisation pour le surplus de travail effectué que dans l’hypothèse où les besoins de la société ou des directives de celle-ci l’ont empêché de s’organiser différemment, ce qui n’était pas le cas. C’est l’employé qui proposait et fixait ses voyages. L’employeur les approuvait uniquement dans un but de contrôle des coûts et n’a, à teneur des témoignages recueillis, jamais obligé un collaborateur à effectuer un voyage. Il ne pouvait au demeurant déduire, sur la seule base des voyages effectués par l’employé, que celui-ci accumulait des heures supplémentaires. En effet, dans la mesure où ce dernier était libre d’organiser son temps de travail, il pouvait légitimement penser qu’il modulait ses horaires de façon à ne pas effectuer d’heures supplémentaires. L’employé, compte tenu de la proportion dans laquelle il atteignait chaque année les objectifs individuels qui lui étaient fixés, faisait vraisemblablement partie des collaborateurs qui accumulaient volontairement des heures supplémentaires afin d’obtenir un bonus le plus élevé possible. Compte tenu de ce qui précède, il sera retenu que l’intimé ne peut prétendre à une indemnisation pour les heures supplémentaire qu’il prétend avoir effectué.
(CJ – GE CAPH/221/2015, c. 4.3)
Me Philippe Ehrenström, LLM, avocat
