Traduire les pièces en justice rédigées dans une langue étrangère ?

La loi ne contient aucune disposition sur la manière de traiter les pièces à la procédure rédigées dans une langue étrangère (MÜLLER, in: Schweizerische Zivilprozessordnung [ZPO], Kommentar, vol. I, Brunner/Gasser/Schwander [éd.], 2e éd. 2016, n° 4 et 24 sur l’art. 180 ZPO; RÜETSCHI, in: Berner Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, vol. II, 2012, n° 21 sur l’art. 180 CPC). Selon l’opinion la plus répandue dans la littérature, l’obligation des parties d’utiliser la langue officielle lors du procès inclut en principe l’obligation de fournir une traduction des documents traduits et rédigés dans une autre langue (DOLGE, in : Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 3e éd. 2017, n° 16 ad art. 180 CPC ; RÜETSCHI, op. cit. ; VOUILLOZ, Im Rahmen des Zivilprozesses eingereichte Belege und Dokumente – die Rolle der Treuhänder und Wirtschaftsprüfer, TREX 2019 p. 273). L’obligation de traduire des documents en langue étrangère est toutefois moins stricte que l’obligation des parties de s’exprimer devant le juge dans la langue officielle (SCHNEUWLY, dans : CPC Code de procédure civile, Chabloz/Dietschy-Martenet/Heinzmann [éd.], 2021, n° 3 ad art. 180 CPC ; SUTTER-SOMM/SEILER, Handkommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2021, n° 2 ad art. 129 CPC ; arrêt 102 2012-91 du tribunal cantonal de Fribourg du 21 août 2012, consid. 2a ; cf. également l’ATF 128 I 273, consid. 2.2, concernant l’ancien droit [genevois]). Dans la pratique, il est fréquent de renoncer à la traduction des pièces justificatives produites, dans la mesure où le tribunal et les parties maîtrisent la langue étrangère (cf. DOLGE, op. cit. ; TREZZINI, in : Commentario pratico al Codice di diritto processuale civile svizzero, 2e éd. 2017, n° 10 ad art. 129 CPC ; JENNY/ABEGG, in : ZPO, Kommentar, Gehri/Jent-Sørensen/Sarbach [éd.], 3e éd. 2023, n° 8 sur l’art. 129 ZPO ; HALDY, in : Commentaire romand, Code de procédure civile, 2e éd. 2019, n° 3 et suivants sur l’art. 129 CPC ; GULDENER, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3e éd. 1979, p. 261 ; décision du tribunal cantonal de Bâle-Campagne du 14 mai 2019 [400 19 18] consid. 3.2, in : BJM 2019 p. 396). Il découle de l’interdiction du formalisme excessif (art. 29, al. 1, Cst.) qu’en cas de vice de forme réparable, le tribunal doit accorder à la partie défaillante un délai supplémentaire pour y remédier (art. 132, al. 1, CPC ; cf. ATF 143 IV 117, consid. 2.1 ; 102 Ia 35, consid. 1 ; STAEHELIN/STAEHELIN/GROLIMUND, Zivilprozessrecht, 3e éd. 2019, § 17, note de marge 4 ; KAUFMANN, in : Schweizerische Zivilprozessordnung [ZPO], Kommentar, vol. I, Brunner/Gasser/Schwander [éd.], 2e éd. 2016, n° 14 ad art. 129 CPC). Il n’est pas nécessaire de fixer un délai de rectification pour la traduction de documents en langue étrangère si ceux-ci sont d’emblée sans importance pour l’issue de la procédure (JENNY/ABEGG, op. cit., n° 8 de l’art. 129 CPC ; FREI, in : Berner Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, vol. I, 2012, n° 13 ad art. 129 CPC). 

(Traduction libre de TF 5A_845/2023 du 17 avril 2024, c. 4.1.2 – original en Allemand)

Me Philippe Ehrenström, avocat, LLM

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