Durant l’exercice fiscal litigieux, le recourant était domicilié à Genève.
Le 5 mars 2012, celui-ci a conclu une convention de fin des rapports de travail avec son ancien employeur, filiale française d’une société allemande. A teneur de cette convention, les rapports de travail prenaient fin d’un commun accord le 30 septembre 2012. Toutefois, les relations de travail pouvaient être prolongées à la demande de l’intéressé jusqu’au 31 décembre 2012 au plus tard. Le travailleur aurait droit au paiement de sa rémunération mensuelle jusqu’au 31 mai 2012. La période du 1 er juin 2012 au 30 septembre 2012 était réputée être une période sans rémunération et sans paiement des cotisations sociales incombant à l’employeur. Dès le 1 er juin 2012, le travailleur était irrévocablement libéré de son obligation de travailler.
L’accord prévoyait aussi que dans « le cadre des dépenses occasionnées par la cessation de son contrat d’engagement « , l’intéressé recevait un paiement extraordinaire brut d’un maximum de 134’250 EUR, dont un acompte de 96’750 EUR serait versé conjointement avec le paiement du salaire du mois de mai 2012. En cas de prolongation des rapports de travail jusqu’au mois de décembre 2012, le collaborateur aurait droit à un montant de 12’500 EUR brut pour chaque mois complet de prolongation, mais au maximum 37’500 EUR. Le montant serait calculé en fonction de la date effective de départ, et le second versement interviendrait « en décembre 2012 ». Si les rapports de travail cessaient au 30 septembre 2012 ou à une date antérieure, le droit au second paiement serait complètement supprimé. Le collaborateur avait droit au versement de son bonus pour l’exercice 2011. Il n’aurait pas droit à une part au prorata du bonus 2012.
La convention comprenait en outre une clause selon laquelle le collaborateur s’engageait jusqu’à 12 mois suivant la date de résiliation du contrat de travail à ne pas débaucher, sous quelque forme que ce soit, des employés ou des indépendants qui travaillaient pour la société ou des sociétés affiliées (non concurrence).
Le contrat de travail ayant été prolongé jusqu’au 31 décembre 2012, le montant de 134’250 EUR a été versé à hauteur de 96’750 EUR en mai 2012, puis en trois versements mensuels de 12’500 EUR d’octobre à décembre 2012.
L’autorité cantonale a notamment considéré que le montant perçu après le 1 er juin 2012 n’est plus la contrepartie d’un emploi salarié exercé effectivement jusqu’au terme contractuel convenu et n’est pas non plus destiné à rémunérer le contribuable pour son activité antérieure. Ainsi, même s’il avait pour cause les rapports de travail ou s’il servait à indemniser le respect d’une clause de non-concurrence, ce montant constitue une rémunération imposable au lieu de résidence du travailleur en vertu de l’art. 23 de la Convention du 9 septembre 1966 entre la Suisse et la France en vue d’éliminer les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l’évasion fiscale en vigueur depuis le 26 juillet 1967 (RS 0.672.934.91; ci-après: CDI CH-FR) et pas une rémunération au sens de l’art. 17 al. 1 CDI CH-FR. Pour sa part, le recourant (= le travailleur) estime en substance que la gratification qu’il a reçue à la fin de ses rapports de travail constitue une prestation en relation directe avec l’activité salariée qu’il a exercée en France et ne se limite pas à une simple indemnité pour clause de non-concurrence. Il estime qu’en application de l’art. 17 al. 1 CDI CH-FR, le montant perçu doit exclusivement être imposé en France, i.e. au lieu d’exercice de l’activité dépendante.
Le litige porte donc sur le point de savoir quelle qualification donner au montant de 87’500 EUR perçu par le recourant à la suite de la fin des rapports de travail en 2012, afin de déterminer s’il s’agit d’un revenu imposable en Suisse (lieu de résidence du travailleur) ou en France (lieu de l’activité dépendante)
Les conventions internationales en matière de double imposition ne contiennent que des règles visant à limiter les pouvoirs d’imposition des Etats mais ne fondent pas l’imposition elle-même. Par conséquent, il convient d’abord de s’assurer de l’existence d’un droit (interne) d’imposition, puis, le cas échéant, de vérifier que ce droit d’imposition n’est pas limité par une disposition conventionnelle visant à restreindre ou éliminer une éventuelle double imposition internationale.
Les personnes physiques sont assujetties à l’impôt à raison du rattachement personnel lorsque, au regard du droit fiscal, elles sont domiciliées ou séjournent en Suisse (art. 3 al. 1 LIFD [RS 642.11]). L’assujettissement fondé sur un rattachement personnel est illimité; il ne s’étend toutefois pas aux entreprises, aux établissements stables et aux immeubles situés à l’étranger (art. 6 al. 1 LIFD). Aux termes de l’art. 16 al. 1 LIFD, l’impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus du contribuable, qu’ils soient uniques ou périodiques. Selon l’art. 17 al. 1 LIFD, sont imposables tous les revenus provenant d’une activité exercée dans le cadre de rapports de travail, qu’elle soit régie par le droit privé ou par le droit public, y compris les revenus accessoires, tels que les indemnités pour prestations spéciales, les commissions, les allocations, les primes pour ancienneté de service, les gratifications, les pourboires, les tantièmes, les avantages appréciables en argent dérivant de participations de collaborateur et les autres avantages appréciables en argent. Sont également imposables, en particulier, tout revenu acquis en lieu et place du revenu d’une activité lucrative (art. 23 let. a LIFD) et les indemnités obtenues lors de la cessation d’une activité ou de la renonciation à l’exercice de celle-ci (art. 23 let. c LIFD).
En l’occurrence, le recourant était domicilié en Suisse durant l’année en cause et y était donc imposé de manière illimitée. Il admet que l’indemnité perçue constitue un revenu au sens des art. 16 ss LIFD. En effet, que le montant de 87’500 EUR ait été perçu en tant que salaire de l’activité dépendante, en tant qu’indemnité liée à une interdiction de faire concurrence ou en tant qu’indemnité de départ, il est dans tous les cas imposable au titre du revenu selon le droit interne. Par ailleurs, ce montant ne constitue pas un revenu exonéré au sens de l’art. 24 LIFD.
L’imposition de l’indemnité perçue étant admise selon la LIFD, il ne reste plus qu’à examiner si une convention de double imposition limite le droit de la Suisse d’imposer le contribuable tel que cela découle du droit interne, ce qui est justement contesté par le recourant.
D’après l’art. 1 CDI CH-FR, la convention s’applique aux personnes qui sont des résidents d’un Etat contractant ou de chacun des deux Etats. Une personne est résidente d’un Etat contractant lorsqu’au regard du droit interne de cet Etat, elle y est assujettie à l’impôt de manière illimitée (art. 4 par. 1 CDI CH-FR).
En l’espèce, le recourant est assujetti de manière illimitée en Suisse. La Suisse revendique cet assujettissement illimité concurrent à la France pour une partie des revenus de la période fiscale 2012 du recourant. Il convient par conséquent de résoudre le présent conflit positif d’assujettissements illimités en application des règles de conflit contenues dans la convention de double imposition entre la Suisse et la France.
[NB : Les dispositions de l’Accord du 11 avril 1983 entre le Conseil fédéral suisse (au nom des cantons de Berne, Soleure, Bâle-Ville, Bâle-Campagne, Vaud, Valais, Neuchâtel et Jura) et le Gouvernement de la République française relatif à l’imposition des rémunérations des travailleurs frontaliers (FF 1983 II 559; cf. art. 17 par. 4 CDI CH-FR) ne trouvent pas d’application dans le canton de Genève (ATF 136 II 241 consid. 9.2).]
La CDI CH-FR étant applicable, il s’agit de déterminer comment interpréter les termes qui y figurent.
A teneur de l’art. 3 par. 2 CDI CH-FR, pour l’application de cette convention par un Etat contractant, tout terme ou expression qui n’y est pas défini a le sens que lui attribue le droit de cet Etat concernant les impôts auxquels s’applique la convention, à moins que le contexte n’exige une interprétation différente. L’art. 3 par. 2 du modèle de convention fiscale de l’OCDE concernant le revenu et la fortune (ci-après: MC OCDE) a une teneur similaire.
S’agissant de cette dernière disposition, une grande partie de la doctrine tend à restreindre son application et à ne mettre en oeuvre le renvoi au droit interne qu’à titre subsidiaire ou comme ultima ratio, lorsque les autres méthodes d’interprétation du droit international public ou de la convention elle-même ne permettent pas de dégager un sens suffisamment clair.
Il convient par conséquent de présenter les dispositions de la CDI CH-FR susceptibles de s’appliquer en l’espèce et examiner dans quelle mesure la jurisprudence a déjà statué sur le sens à donner aux éventuels termes ou expressions qui ne seraient pas définis dans la convention.
Les art. 6 à 22 CDI CH-FR (dont la teneur correspond en grande partie à celle des art. 6 à 20 MC OCDE) concernent différents types de revenus spéciaux, dont la compétence d’imposition revient, selon les cas, à la Suisse ou à la France.
Ainsi, on peut relever l’art. 17 par. 1 CDI CH-FR (dont la teneur correspond à celle de l’art. 15 par. 1 MC OCDE), selon lequel, sous réserve des dispositions des art. 18 à 21 CDI CH-FR, les salaires, traitements et autres rémunérations similaires qu’un résident d’un Etat contractant reçoit au titre d’un emploi salarié ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l’emploi ne soit exercé dans l’autre Etat contractant. Si l’emploi y est exercé, les rémunérations reçues à ce titre sont imposables dans cet autre Etat.
En outre, aux termes de l’art. 20 par. 1 CDI CH-FR (dont la teneur correspond en grande partie à celle de l’art. 18 MC OCDE), les pensions et autres rémunérations similaires, versées à un résident d’un Etat contractant au titre d’un emploi antérieur, ne sont imposables que dans cet Etat.
Dans la mesure où les éléments du revenu en cause n’entrent pas dans le champ d’application des art. 6 à 22 CDI CH-FR, alors ceux-ci sont imposés en vertu des dispositions de l’art. 23 CDI CH-FR (cf. art. 21 MC OCDE) : les éléments du revenu d’un résident d’un Etat contractant, d’où qu’ils proviennent, dont ce résident est le bénéficiaire effectif et qui ne sont pas traités dans les articles précédents de la présente convention ne sont imposables que dans cet Etat.
Il convient donc plus précisément de déterminer si l’indemnité perçue par le recourant peut être interprétée comme un « salaire, traitement et autre rémunération similaire » au sens de l’art. 17 par. 1 CDI CH-FR, une « pension ou autre rémunération similaire » au sens de l’art. 20 par. 1 CDI CH-FR ou un « autre revenu » tombant dans le champ d’application de l’art. 23 CDI CH-FR.
Dans un arrêt 2C_604/2011 du 9 mai 2012 consid. 4.2, le Tribunal fédéral a relevé que les notions de « salaires, traitements et autres rémunérations similaires » reçues au titre d’un « emploi salarié », au sens de l’art. 15 par. 1 MC OCDE, de « pensions et autres rémunérations similaires », visées par l’art. 18 MC OCDE, ainsi que d' »autres revenus », au sens de l’art. 21 MC OCDE, ne sont pas définies dans le MC OCDE.
Dans ce même arrêt 2C_604/2011 du 9 mai 2012 consid. 4.2, le Tribunal fédéral a continué en jugeant que pour ce qui est des « salaires, traitements et autres rémunérations similaires » reçues au titre d’un emploi salarié, une majorité d’auteurs considèrent que ces notions peuvent être interprétées à la lumière du droit interne, une interprétation autonome ne s’imposant pas. Quant aux notions de « pensions et autres rémunérations similaires », le Tribunal fédéral a relevé qu’elles doivent quant à elles être interprétées de manière autonome.
Le Tribunal fédéral a ainsi procédé à l’interprétation de ces notions en expliquant que, selon le Commentaire de l’OCDE sur les modèles de convention fiscale concernant le revenu et la fortune (actuellement dans sa version de 2014), l’art. 15 par. 1 MC OCDE pose la règle générale applicable en matière d’imposition des revenus provenant d’activités salariées, à l’exception des pensions, selon laquelle ces revenus sont imposables dans l’Etat où l’emploi salarié est effectivement exercé. L’emploi est exercé à l’endroit où le salarié est physiquement présent lorsqu’il exerce les activités en contre-prestation desquelles la rémunération est versée. La condition prévue par l’art. 15 MC OCDE pour l’imposition par l’Etat de la source est que les salaires, traitements et autres rémunérations similaires proviennent de l’exercice d’un emploi dans cet Etat. Cette règle s’applique quel que soit le moment où cette rémunération est versée, créditée ou autrement définitivement acquise par le salarié.
Par « salaire, traitement ou rémunération similaire« , au sens de l’art. 15 par. 1 MC OCDE, il faut entendre toutes les prestations (périodiques ou non) fournies en raison d’une activité salariée dont elles constituent la contrepartie, à l’exclusion des pensions et autres rémunérations visées par l’art. 18 MC OCDE. Les compléments de salaire tels que les primes (boni) constituent clairement une rémunération au sens de l’art. 15 al. 1 MC OCDE.
En résumé, on peut retenir que la jurisprudence interprète les notions de « salaires, traitements et autres rémunérations similaires » en ce sens que la rémunération, unique ou périodique, qui constitue une contrepartie à une activité salariée, quel que soit le moment de son versement, entre dans le champ d’application de l’art. 15 par. 1 MC OCDE, respectivement 17 par. 1 CDI CH-FR.
S’agissant en revanche d’une indemnité compensant une clause de non-concurrence stipulée à la fin des rapports de travail ou de celle versée en cas de résiliation anticipée de ceux-ci, le Tribunal fédéral, faisant référence à la doctrine suisse, considère qu’il s’agit d’un « autre revenu » au sens de l’art. 21 par. 1 MOCDE (cf. arrêt 2C_604/2011 du 9 mai 2012 consid. 4.4 et les références citées). En effet, bien que liée aux rapports de travail, une telle indemnité n’est pas versée en premier lieu comme contre-prestation pour le travail fourni; elle a sa cause dans l’engagement de la personne concernée à ne pas exercer d’activité concurrente ou dans la volonté de faciliter la transition professionnelle.
Finalement, en rapport avec l’art. 18 MC OCDE, le Tribunal fédéral a jugé que les montants versés avant que le travailleur ait atteint l’âge de la retraite constituent en principe la rémunération du travail au sens de l’art. 15 par. 1 MOCDE (arrêt 2C_604/2011 du 9 mai 2012 consid. 4.4 et la référence citée); il peut cependant s’agir de versements similaires à des pensions (art. 18 MC OCDE), lorsqu’ils sont destinés à assurer la transition jusqu’à la retraite.
Le Tribunal fédéral a toutefois relevé qu’en pratique, il pouvait exister des problèmes de délimitation entre l’art. 15 par. 1 MC OCDE et, respectivement, les art. 18 et 21 MC OCDE, lorsque le travailleur perçoit une rémunération sans avoir exercé d’activité, notamment lorsque celui-ci a perçu une indemnité en raison de résiliation anticipée des rapports de travail. Or, dans la présente cause, le recourant a justement perçu une telle indemnité, alors qu’il avait été définitivement libéré de son obligation de travailler. Il convient donc de se demander si ce revenu entre dans la notion de « salaires, traitements et autres rémunérations similaires » de l’art. 15 par. 1 MC OCDE ou s’il s’agit d’un « autre revenu » ou d’une « pension ou une autre rémunération similaire ». Le Tribunal fédéral n’a jusqu’à présent jamais eu l’occasion de se prononcer à ce propos.
S’agissant des indemnités versées en cas de résiliation des rapports de travail (ou indemnité de dédit; » Abfindungen bei Beendigung des Arbeitsverhältnisses « ), la doctrine relève qu’il n’existe qu’un nombre limité de cas dans lesquels le traitement de ces indemnités a été analysé sous l’angle du MC OCDE. La doctrine est en outre divisée quant à savoir si de telles indemnités doivent être considérées comme étant des revenus au sens de l’art. 15 MC OCDE ou « d’autres revenus » au sens de l’art. 21 MC OCDE.
La Suisse et l’Allemagne ont trouvé un accord sur l’imposition des indemnités versées en cas de résiliation anticipée des relations de travail. Il convient en effet de mentionner l’accord amiable ( » Verständi-gungsvereinbarung « ) germano-suisse des 4 décembre 1991 et 28 août 1992 (dans sa version postérieure à l’accord amiable du 17 mars 2010) relatif à l’imposition des indemnités perçues par l’employé salarié selon l’art. 15 de la Convention du 11 août 1971 entre la Confédération suisse et la République fédérale d’Allemagne en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (RS 0.672.913.62; ci-après: CDI CH-DE; disponible sur le site Internet de l’Administration fédérale des contributions).
Selon cet accord, intervenu en application de l’art. 26 par. 4 CDI CH-DE, il convient d’examiner quelle spécificité présente l’indemnité perçue. Si elle revêt un caractère de prévoyance, alors l’imposition intervient sur la base de l’art. 18 MC OCDE. Dans l’éventualité où l’indemnité est perçue en tant que paiement d’arriéré de salaire ou de traitement, respectivement de tantièmes provenant d’un précédant rapport de travail ou encore qu’elle est due, de manière générale, en raison de la fin prématurée des rapports de travail, il revient à l’Etat dans lequel le travail était effectué d’imposer l’employé. Il en va différemment si le paiement d’indemnités est intervenu en raison de la dissolution des rapports de travail et que la personne qui perçoit ces indemnités réside dans un Etat contractant qui n’est pas celui dans lequel se trouve son ancien employeur. Dans un tel cas de figure, c’est l’Etat de résidence qui peut procéder à l’imposition du contribuable. L’accord amiable ne traite par contre pas de la perception d’une indemnité liée à une clause de non-concurrence.
On rappellera qu’en l’occurrence, le 31 mai 2012, ayant été irrévocablement libéré de son obligation de travailler, le recourant a effectué son dernier jour de travail auprès de son ancien employeur. Dès le 1 er juin 2012, il ne s’est ainsi plus rendu en France pour exercer son activité professionnelle, malgré un engagement jusqu’au 31 décembre 2012. Pour la période postérieure au 31 mai 2012, il a obtenu un montant de 134’250 EUR » dans le cadre des dépenses occasionnées par la cessation de son contrat d’engagement « .
Sur le vu de ce qui précède, on peut d’emblée exclure toute prestation de prévoyance. En effet, le recourant est encore loin d’avoir atteint l’âge de la retraite et rien ne laisse penser que le montant reçu l’ait été dans une optique de transition jusqu’à l’âge de la retraite. Seule reste donc ouverte la question de savoir si la rémunération doit être considérée comme un « salaire, traitement ou autre rémunération similaire » au sens de l’art. 17 par. 1 CDI CH-FR ou comme un « autre revenu » au sens de l’art. 23 par. 1 CDI CH-FR.
Le versement des 134’250 EUR, intervenu postérieurement à la fin de l’activité salariée, doit être compris comme une indemnité versée en cas de résiliation des rapports de travail (comme cela ressort d’ailleurs du texte de la convention). Or, la Suisse n’a pas conclu d’accord amiable avec la France quant au traitement de ces indemnités, au contraire de ce qu’elle a fait avec l’Allemagne. Dans un tel cas de figure, il convient de considérer le versement opéré le plus objectivement possible, c’est-à-dire sans prendre en compte les éventuels accords intervenus entre l’employeur et l’employé qui pourraient tendre à choisir le lieu d’une éventuelle imposition. On constate donc que les indemnités reçues par le recourant pour la période allant du 1 er juin 2012 au 31 décembre 2012, si elles ont certes leur cause dans l’activité déployée précédemment en faveur de l’employeur français, ne constituent cependant pas une contre-prestation pour un travail effectué, le recourant ayant définitivement arrêté de travailler le 31 mai 2012. En ce sens, il convient de considérer cette indemnité comme un « autre revenu » au sens de l’art. 23 CDI CH-FR, respectivement de l’art. 21 MC OCDE, dont l’imposition doit se faire au lieu de résidence. Cette solution est en accord avec la situation de fait puisque, durant la période en cause, le recourant n’est plus retourné en France pour exercer un travail, mais est resté en Suisse, à son lieu de résidence. Une telle façon de procéder permet au demeurant de se fonder uniquement sur les faits tels qu’ils ont été constatés objectivement et ainsi de tendre à un traitement semblable entre les contribuables, quelle que soit la façon dont les rapports de travail ont pris fin et ont été réglementés et quel que soit le pays concerné. Cela permet également de ne pas examiner le point de savoir si la somme versée par l’employeur ne l’a pas (aussi) été en raison de la clause de non-concurrence que celui-ci a conclue avec le recourant, les montants reçus en raison d’une telle clause tombant en effet aussi dans la notion d' »autres revenus » de l’art. 23 par. 1 CDI CH-FR. En outre, cette solution, dans le cas d’espèce, est cohérente avec la position helvétique telle qu’elle ressort de l’accord amiable conclu avec l’Allemagne.
En définitive, le montant de 134’250 EUR devrait être imposé en Suisse comme « autre revenu » au sens de l’art. 23 par. 1 CDI CH-FR. Dans la mesure où la Cour de justice a confirmé la décision de l’Administration fiscale tendant à ne pas imposer une partie de l’indemnité perçue par le recourant (en l’occurrence 46’750 EUR), il ne saurait être statué en défaveur du recourant au stade du Tribunal fédéral (cf. consid. 2.2 ci-dessus), si bien que seul le montant de 87’500 EUR sera imposé.
(Arrêt du Tribunal fédéral 2C_628/2016, 2C_629/2016 du 10 février 2017, destiné à la publication)
Me Philippe Ehrenström, avocat, ll.m., Genève et Yverdon