L’employeur qui ne paie pas le salaire : demeure, intérêts et droit de résilier le contrat

pexels-photo-164552.jpegSelon l’art. 322 al. 1 CO, l’employeur paie au travailleur le salaire convenu, usuel ou fixé par un contrat-type de travail ou par une convention collective.

Selon l’art. 323 al. 1 CO, si des délais plus courts ou d’autres termes de paiement ne sont pas prévus par accord ou ne sont pas usuels et sauf clause contraire d’un contrat-type de travail ou d’une convention collective, le salaire est payé au travailleur à la fin de chaque mois.

Si l’employeur ne s’exécute pas le dernier jour du mois, il est en demeure dès le lendemain (art. 102 al. 2 CO); il doit dès lors l’intérêt moratoire au taux de 5% l’an, sauf convention contraire (art. 104 al. 1 et 2 CO; arrêt du Tribunal fédéral 4C.95/2000 du 13 juin 2000 consid. 4a).

Quand l’employeur se trouve en demeure de verser le salaire échu, le travailleur peut refuser sa propre prestation jusqu’au paiement de ce qui est dû, en vertu de l’art. 82 CO appliqué par analogie (ATF 136 III 313 = JdT 20112 II 414 consid. 2.3.1 et 120 II 209 consid. 6a = JdT 1995 I 367). Dans ce laps de temps, le droit au salaire subsiste alors même que le travail n’est pas fourni (ATF 136 III 313 consid. 2.3.1 et 120 II 209 consid. 6a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_199/2008 du 2 juillet 2008 consid. 2).

En cas de retard répété et prolongé dans le paiement du salaire échu, si ce retard persiste en dépit d’une sommation du travailleur, celui-ci peut résilier immédiatement le contrat (art. 337 CO; arrêt du Tribunal fédéral 4A_199/2008 du 2 juillet 2008 consid. 2 ).

La jurisprudence exige que la sommation soit claire (arrêts du Tribunal fédéral 4C.2/2003 du 25 mars 2003 consid. 5.2 et 4C.203/2000 du 2 avril 2001 consid 4c). Cette mise en demeure est le pendant de l’avertissement préalable imposé à l’employeur lorsque le manquement imputable au travailleur n’est pas assez grave pour justifier un licenciement immédiat sans avertissement (arrêt du Tribunal fédéral 4C.2/2003 du 25 mars 2003 consid. 5.2 ). Lorsque le délai imparti est objectivement trop court, le débiteur n’a pas le droit de l’ignorer purement et simplement. Il doit protester et demander une prolongation à son cocontractant. S’il s’en abstient, il est censé agréer le délai fixé (ATF 116 II 436 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_192/2008 du 9 octobre 2008 consid. 6). L’avertissement n’est cependant pas nécessaire lorsqu’il résulte de l’attitude de l’autre partie qu’une telle démarche serait inutile (ATF 127 III 153 consid. 1b).

La question de savoir si l’avertissement est suffisant lorsque la mise en demeure de l’employé n’indique pas expressément à l’employeur qu’à défaut de paiement de ses salaires, il résiliera son contrat avec effet immédiat a été laissée indécise par le Tribunal fédéral dans l’arrêt 4C.2/2003 du 25 mars 2003, dès lors que, dans ce cas d’espèce, l’employeur avait démontré, par son attitude, qu’il ne verserait rien à son employé, l’ayant licencié et dispensé de l’obligation de travailler, avait suspendu le versement du salaire durant deux mois consécutifs et lui avait opposé la compensation.

(CAPH/195/2017)

Me Philippe Ehrenström, LL.M., avocat, Genève et Yverdon-les-Bains

A propos Me Philippe Ehrenström

Ce blog présente certains thèmes juridiques en Suisse ainsi que des questions d'actualité. Il est rédigé par Me Philippe Ehrenström, avocat indépendant, LL.M. (Tax), Genève et Yverdon.
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