Au chapitre « Fin des rapports de service » et sous le titre marginal « Suppression d’un poste », l’art. 23 de la loi générale du canton de Genève relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC; RS/G B 5 05) prévoit que lorsque, pour des motifs de réorganisation ou de restructuration du service, un poste occupé par un membre du personnel régulier est supprimé, le Conseil d’Etat, la commission de gestion du pouvoir judiciaire ou le conseil d’administration peut résilier les rapports de travail (al. 1).
Une telle résiliation ne peut intervenir que s’il se révèle impossible de confier au membre du personnel régulier un autre poste correspondant à ses capacités (al. 2). Le membre du personnel est entendu (al. 3).
En outre, l’alinéa 4 de l’art. 23 LPAC dispose qu’en cas de résiliation, seul le fonctionnaire reçoit une indemnité égale à 6 fois son dernier traitement mensuel de base, plus 0,2 fois son dernier traitement mensuel de base par année passée au service de l’Etat ou de l’établissement, une année entamée comptant comme une année entière; le nombre de mois d’indemnités versées ne peut excéder le nombre de mois restant à courir jusqu’à l’âge légal de retraite du fonctionnaire.
A la suite d’un protocole d’accord entre les associations représentatives du personnel et le Conseil d’Etat, ce dernier a adopté le 28 mars 2007 une directive relative à l’application de l’art. 23 LPAC appelée « Dispositif en cas de suppression de poste ». Elle contient une règle dont la teneur est la suivante: « Les collaborateurs-trices dont le poste est supprimé sont prioritaires sur les postes vacants. Les recrutements de personnes externes à l’Etat ne seront, en conséquence, pas autorisés sauf exception validée par le Conseil d’Etat. L’OPE peut imposer qu’un collaborateur dont le poste est supprimé, et dont les compétences sont en adéquation avec un poste vacant, y soit affecté, que ce soit sur le plan départemental ou interdépartemental. La situation des cadres supérieurs est réservée. »
Le Tribunal fédéral estime que le recourant ne saurait être suivi lorsqu’il prétend déduire de l’art. 23 al. 2 LPAC que lorsqu’il existe au sein de l’Etat un autre poste en adéquation avec les compétences du fonctionnaire dont le poste est supprimé, celui-ci aurait droit à se faire attribuer ce poste plutôt que d’être licencié.
Une telle interprétation n’est pas compatible avec la lettre de cette disposition qui ne prévoit pas un droit à être réaffecté dans un autre poste au sein de l’Etat.
En faisant dépendre le licenciement de l’impossibilité de confier à l’intéressé une autre fonction correspondant à ses capacités, l’art. 23 al. 2 LPAC doit bien plutôt se comprendre – ainsi que l’a retenu la cour cantonale – comme la concrétisation légale du principe de proportionnalité qui commande à l’Etat, lorsqu’il supprime un poste en raison d’une restructuration, de proposer si possible à l’employé concerné une autre place répondant à ses aptitudes. Autrement dit, l’art. 23 LPAC exige de l’Etat employeur une obligation de moyen mais non pas de résultat.
En ce qui concerne la réserve contenue dans la directive selon laquelle la possibilité d’imposer la réaffectation d’un membre du personnel dont le poste est supprimé ne s’applique pas aux fonctionnaires ayant un statut de cadre supérieur, elle demeure dans le cadre défini par la loi. En effet, comme on l’a vu, le fonctionnaire ne bénéficie pas d’un droit à être réaffecté dans une nouvelle fonction. Il reste toutefois à examiner si cette distinction est constitutive d’une inégalité de traitement.
Selon l’art. 2 al. 1 du règlement sur les cadres supérieurs de l’administration cantonale du 22 décembre 1975 [RCSAC; RS/G B 5 05.03]), sont nommés en cette qualité les fonctionnaires appelés, par leurs responsabilités hiérarchiques ou fonctionnelles, à préparer, proposer ou prendre toute mesure ou décision propre à l’élaboration et à l’exécution des tâches fondamentales du pouvoir exécutif. Ils ont également pour tâche d’instruire les cadres intermédiaires sur les objectifs des services qui leur sont subordonnés (art. 3 al. 2 RCSAC). Leur fonction se situe à compter de la classe 23 de l’échelle de traitement (art. 2 al. 2 RCSAC).
Les fonctionnaires cadres supérieurs occupent donc des positions stratégiques à l’interface entre l’autorité exécutive supérieure et les divers services de l’administration. A ce niveau de responsabilités qui implique de travailler en lien étroit avec les chefs respectifs des départements concernés voire directement avec le Conseil d’Etat qui sont autorité d’engagement (art. 1 al. 2 et 3 RCSAC), l’instauration d’une relation de confiance constitue un élément essentiel pour assurer une collaboration efficace. A cet égard, outre les compétences professionnelles requises, la dimension de la personnalité peut jouer un rôle déterminant. Aussi bien se justifie-t-il, dans l’intérêt d’un bon fonctionnement de l’administration, de faire bénéficier l’autorité d’engagement d’un certain choix dans les candidatures lorsqu’il s’agit de pourvoir une fonction de cadre supérieur, ce qui s’impose moins fortement pour les postes sans fonction dirigeante élevée et moins exposés où il peut être exigé de la part de la hiérarchie en place d’accepter une plus grande restriction à cet égard. Il existe donc un motif raisonnable à faire dépendre la possibilité d’imposer la réaffectation d’un fonctionnaire de la nature et de la qualification de la fonction à pourvoir. La réserve formulée pour les fonctionnaires cadres supérieurs n’apparaît dès lors pas contraire à l’art. 8 Cst.
(Arrêt du Tribunal fédéral 8C_285/2015 du 27 avril 2016)