Congé abusif, licenciement économique d’un représentant des travailleurs

IMG_5523Le Tribunal fédéral, au consid. 3 d’un arrêt 4A_656/2016 du 1er septembre 2017, revient (assez sèchement) sur cette question :

En vertu de l’art. 336 al. 2 let. b CO, le congé notifié à l’employé est abusif s’il a été donné par l’employeur en raison de l’appartenance ou de la non-appartenance du travailleur à une organisation de travailleurs ou en raison de l’exercice conforme au droit d’une activité syndicale.

Le Tribunal fédéral a considéré qu’un licenciement donné pour des motifs économiques n’est pas abusif, pour autant qu’il ne soit pas en lien avec l’activité exercée par l’employé comme représentant élu des travailleurs (ATF 133 III 512 consid. 6; 138 III 359 consid. 6.2).

Le recourant critique cette jurisprudence au motif qu’elle irait à l’encontre de la volonté du législateur d’octroyer une protection particulière aux représentants élus des travailleurs (acte de recours p. 19 ss). Il sollicite un changement de jurisprudence en ce sens qu’un motif économique ne peut pas constituer un motif justifié de résiliation du contrat de travail d’un représentant élu des travailleurs (acte de recours p. 23).

Le recourant s’appuie ce faisant sur une position doctrinale minoritaire (BRUNNER/BÜHLER/WAEBER/BRUCHEZ, Commentaire du contrat de travail, no 10 ad art. 336 CO; BRUCHEZ/DONATIELLO, in Commentaire du contrat de travail, Dunand/Mahon [éd.], 2013, no 33 ad art. 335f CO). Ce raisonnement a pourtant déjà été écarté par le Tribunal fédéral au motif qu’une restructuration d’entreprise justifiée par des motifs économiques objectifs, tenant par exemple à la prévention de difficultés envisageables dans la marche future des affaires, peut constituer un motif justifié propre à renverser la présomption selon laquelle le congé est abusif (ATF 133 III 512 consid. 6.2 à 6.4).

En outre, la plupart des arguments soulevés par le recourant (basés sur la relation avec l’art. 340c CO et sur la prétendue volonté du législateur) ont déjà été largement discutés, puis réfutés dans l’ATF 138 III 359 consid. 6. Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral a confirmé l’ATF 133 III 512, en considérant que l’interprétation littérale, historique et téléologique de l’art. 336 al. 2 let. b CO n’excluait pas qu’un motif économique puisse constituer un motif justifié (ATF 138 III 359 consid. 6). Le recourant ne fournit aucun argument nouveau à cet égard, qui nécessiterait un nouvel examen de la jurisprudence, et il n’y a donc pas lieu d’y revenir.

Quant à la position de l’Office fédéral de la justice exprimée dans le rapport explicatif et l’avant-projet de septembre 2010 sur la révision partielle du Code des obligations (sanction en cas de congé abusif ou injustifié), elle n’est pas déterminante, puisque la procédure législative a été suspendue et qu’aucune modification légale n’est encore entrée en vigueur sur cette base.

Me Philippe Ehrenström, avocat, ll.m., Genève et Yverdon

A propos Me Philippe Ehrenström

Ce blog présente certains thèmes juridiques en Suisse ainsi que des questions d'actualité. Il est rédigé par Me Philippe Ehrenström, avocat indépendant, LL.M. (Tax), Genève et Yverdon.
Cet article, publié dans Licenciement abusif, est tagué , , . Ajoutez ce permalien à vos favoris.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s