La libération de l’obligation de travailler («Freistellung») est un acte juridique unilatéral exercé par l’employeur en vertu de son droit de donner des instructions (art. 321d al. 1 CO). L’employeur renonce, dans son propre intérêt, à la prestation de travail de l’employé. La fin de l’obligation de travailler ne met toutefois pas un terme aux rapports de travail. En particulier, l’employeur reste débiteur du salaire jusqu’à la fin du contrat.
La cour cantonale a considéré comme notoire le fait que, dès l’instant où ils étaient licenciés, les gestionnaires de fortune n’étaient plus autorisés, sauf circonstances exceptionnelles, à entrer en contact avec la clientèle. Elle a retenu que cette règle était également valable dans l’entreprise de la défenderesse. Cette dernière soutenait toutefois que le demandeur aurait dû consacrer son temps de travail en mars 2003 à rédiger des rapports sur les démarches de prospection effectuées jusqu’alors. Pour sa part, le gestionnaire alléguait avoir toujours été dispensé d’une telle tâche. Constatant à cet égard que le demandeur n’avait jamais reçu la moindre critique quant à l’absence de rapports périodiques d’activité, alors qu’il avait été averti pour un problème de vacances, la Cour d’appel a donné la préférence à la version de l’employé sur ce point. Les juges précédents ont enfin relevé que la défenderesse n’avait fourni aucune explication précise sur d’autres travaux administratifs qu’elle aurait entendu confier au demandeur durant le délai de congé d’un mois. Sur la base de ces éléments, la cour cantonale a admis que l’employé avait «vraisemblablement» été libéré de son obligation de travailler pendant le délai de préavis, ce que l’employeur critique.
La libération de l’obligation de travailler pendant le délai de congé n’est pas soumise à la forme écrite. Elle peut intervenir par actes concluants; dans des circonstances particulières, la résiliation elle-même peut contenir implicitement une libération de l’obligation de travailler.
Les règles sur l’interprétation selon le principe de la confiance s’appliquent non seulement au consentement contractuel, mais également aux déclarations de volonté en général, y compris les actes juridiques unilatéraux. Il s’agit de rechercher comment une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l’ensemble des circonstances. Le principe de la confiance permet d’imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime.
Dans le cas présent, le gestionnaire n’était plus autorisé, dès l’annonce de son licenciement, à entretenir des contacts avec les clients de la défenderesse, alors que son travail consistait précisément à prospecter la clientèle. Par ailleurs, il ne participait plus aux réunions hebdomadaires du comité de gestion. Enfin, l’employé n’avait pas à établir des rapports sur ses démarches de prospection. Il apparaît ainsi que le gestionnaire licencié n’avait plus aucune tâche à accomplir pour son employeur. Dans ces circonstances très particulières, le demandeur pouvait comprendre de bonne foi qu’en lui signifiant la résiliation du contrat de travail, la défenderesse le dispensait par là-même de son obligation de travailler. En admettant une libération de l’obligation de travailler par actes concluants, la cour cantonale n’a ainsi pas violé le droit fédéral.
(ATF 4C.329/2004)