L’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme Barbulescu c/ Roumanie no 61496/08 du 12 janvier 2016 examine (notamment) la question de la surveillance d’internet par l’employeur sous l’angle de l’art. 8 CEDH.
Bogdan Mihai Barbulescu, citoyen roumain, a travaillé pour une société privée comme ingénieur commercial d’août 2004 à août 2007. A la demande de l’employeur, M. Barbulescu a créé une adresse Yahoo Messenger pour recevoir et traiter les questions de la clientèle. L’employeur a contrôlé les communications de l’employé sur ce compte du 5 au 13 juillet 2007. Il s’est alors avéré que l’employé avait utilisé cette adresse à des fins privées. L’employeur a présenté à l’employé des messages échangés entre celui-ci et son frère et sa fiancée concernant (notamment) sa santé et sa vie sexuelle. L’employeur a alors licencié M. Barbulescu pour violation des directives de l’employeur interdisant l’utilisation des ressources professionnelles à des fins privées.
M. Barbulescu a contesté la décision de l’employeur devant les juridictions nationales puis devant la Cour européenne des droits de l’homme en invoquant notamment le fait que les emails étaient protégés par l’art. 8 par. 1 CEDH protégeant le droit au respect de la vie privée et familiale (« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ».)
La Cour, dans ce contexte, note qu’il n’est pas déraisonnable qu’un employeur veuille ou puisse vérifier que des employés accomplissent leurs tâches pendant les heures de travail (§59). Par ailleurs, seules les communications émanant de ou reçues par le compte en cause ont été surveillées, et non d’autres données ou documents de l’ordinateur de M. Barbulescu ; la surveillance était donc limitée dans son ampleur et proportionnée (§60). M. Barbulescu n’avait par ailleurs pas démontré pourquoi il avait utilisé ce compte pour des communications et des usages privés (§61).
En conséquence, la Cour considère que rien n’indique que les juridictions nationales auraient échoué à faire la balance entre les droits de M. Barbulescu au respect de sa vie privée et de sa correspondance et les intérêts légitimes de l’employeur (§ 62), ce qui entraînait qu’il n’y avait pas eu violation de l’art. 8 CEDH.