
Selon l’art. 329a al. 1 CO, l’employeur accorde au travailleur, chaque année de service, quatre semaines de vacances au moins.
Il verse au travailleur le salaire total afférent aux vacances (art. 329d al. 1 CO).
Tant que durent les rapports de travail, les vacances ne peuvent pas être remplacées par des prestations en argent (art. 329d al. 2 CO).
Les vacances que le travailleur n’aura pas pu prendre effectivement d’ici à l’échéance des rapports de travail se transforment à ce moment en une dette d’argent de l’employeur. Celui-ci devra indemniser le travailleur pour les jours restants.
La rémunération des vacances sous la forme d’une indemnité payée en sus du salaire courant pour les périodes effectivement travaillées n’est admise qu’à titre exceptionnel et moyennant le respect de strictes exigences de formes. Les décomptes de salaire doivent notamment mentionner de manière chiffrée la part du salaire global destinée à indemniser les vacances. Si les conditions nécessaires à la stipulation d’une indemnité de vacances ne sont pas remplies, l’employé peut réclamer le paiement des vacances à la fin des rapports de travail, indépendamment de la question de savoir s’il a effectivement bénéficié de ses vacances.
A teneur de l’art. 18 al. 1 CO, pour apprécier la forme et les clauses d’un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s’arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention.
Le juge doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d’indices; si elle aboutit, cette démarche conduit à une constatation de fait. S’il ne parvient pas à déterminer cette volonté, ou s’il constate qu’une partie n’a pas compris la volonté manifestée par l’autre, le juge doit rechercher, par l’interprétation selon la théorie de la confiance, quel sens les parties pouvaient ou devaient donner, de bonne foi, à leurs manifestations de volonté réciproques (principe de la confiance); il s’agit d’une question de droit. Le principe de la confiance permet ainsi d’imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même s’il ne correspond pas à sa volonté intime.
Le juge tiendra compte des termes utilisés ainsi que du contexte et de l’ensemble des circonstances dans lesquelles les déclarations ont été émises.
En l’espèce, c’est à juste titre que le Tribunal a constaté que les intentions des parties divergeaient sur la question de savoir si l’indemnité discrétionnaire correspondant à trois mois de salaire supplémentaire versée par la recourante (= l’employeuse) incluait ou non la rémunération relative aux vacances que l’intimée (= l’employée) n’avait pas eu la possibilité de prendre pendant son délai de congé.
C’est également à bon droit que le Tribunal a considéré que, en application du principe de la confiance, l’intimée pouvait et devait comprendre que tel n’était pas le cas.
Le courrier du 30 janvier 2019 prévoyant cette indemnité discrétionnaire n’indique en effet pas que celle-ci inclut la rémunération relative au solde de vacances que l’intimée ne pourrait pas prendre avant la fin des rapports de travail. Il n’est pas non plus spécifié que cette indemnité est versée pour solde de tout compte.
A cela s’ajoute que le paiement des vacances n’est pas un élément de rémunération laissé à la discrétion de l’employeur, de sorte que l’intimée n’avait aucune raison de penser que ledit paiement était inclus dans l’indemnité, expressément qualifiée de « discrétionnaire », prévue par le courrier précité.
Le fait que cette indemnité « discrétionnaire » ait été fixée par un courrier séparé de la lettre de licenciement, laquelle comprend notamment une mention relative à l’assurance accident, tend en outre à confirmer que l’indemnité discrétionnaire était un élément distinct du règlement des obligations légales respectives de parties à la fin des rapports de travail, lesquelles incluent, entre autres, le règlement du droit aux vacances.
De plus, l’employeur qui souhaite que les vacances en nature soient remplacées par un paiement en espèces doit mentionner par écrit, de manière chiffrée, la part du salaire destiné à indemniser les vacances. A défaut, l’employé est autorisé à réclamer le paiement de ses vacances à la fin des rapports de travail. Or la recourante n’a pas établi avoir transmis à l’intimée un document correspondant à ces exigences.
Il ressort de ce qui précède qu’aucun élément du dossier ne permet de retenir qu’il existe un accord entre les parties selon lequel l’indemnité discrétionnaire versée par la recourante incluait le paiement des jours de vacances dus à l’intimée à la fin des rapports de travail.
C’est dès lors à juste titre que le Tribunal a condamné la recourante à verser à l’intimée le montant correspondant, dont la quotité n’est pas contestée.
(Arrêt de la Chambre des prud’hommes de la Cour de justice CAPH/52/2021 du 5 mars 2021)
Me Philippe Ehrenström, LL.M., avocat, Genève et Onnens (VD)