
Jon Holbrook, Barrister, est sanctionné par le Bar Standars Board pour avoir posté le tweet suivant:
« Free speech is dying & Islamists & other Muslims are playing a central role. Who will lead the struggle to reinstate free speech as the foundation of all other freedoms?»
Ce tweet s’insérait dans des échanges ayant suivi l’assassinat d’un enseignant en France pour avoir montré des caricatures de l’Islam publiées en leur temps dans Charlie Hebdo et, plus spécifiquement, venait en réponse à un autre tweet qui demandait que des mesures soient prises contre ce journal accusé de jeter de l’huile sur le feu.
Le BSB a donc prononcé à l’encontre de Jon Holbrook un avertissement et l’a condamné à une amende de GBP 500 car ce tweet « would not only cause offense but could promote hostility towards Muslims as a group », ce qui constituait une violation des règles professionnelles applicables. Plus précisément, il se serait agi d’une violation du principe (Core Duty 5) selon lequel « You must not behave in a way which is likely to diminish the trust and confidence which the public places in you or in the profession. »
Jon Holbrook fait appel devant The Bar Tribunal and Adjudication Service (BTAS ; case NO 2021/4441), lequel a rendu sa décision le 25 mars 2022 (consultable ici : https://www.tbtas.org.uk/wp-content/uploads/hearings/5352/Approved-Report-of-Administrative-Appeal-Decision-Holbrook.pdf).
La décision est intéressante en ce qu’elle précise ce que l’on doit attendre de l’usage de twitter par un Barrister, en tenant compte de la liberté d’expression, d’une part, mais aussi des exigences propres à une profession régulée par l’Etat d’autre part. Elle retient notamment que « for the expression of a political belief to be such that it diminishes the trust of the public in the particular barrister or in the profession as a whole will require something more than the mere causing of offence. At the very least, the relevant speech would have to be «seriously offensive» or «seriously discreditable » (…) » (§44), ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
Vanessa Reid, dans un commentaire très développé de cette décision publié sur le site remarquable du « Secret Barrister » (cf. https://thesecretbarrister.com/2022/04/19/guest-post-you-can-tweet-if-you-want-to-so-long-as-youre-polite-about-it-the-current-state-of-regulatory-oversight-over-social-media/), en retient que la forme est importante pour apprécier si une publication sur twitter viole les règles professionnelles applicables aux avocats : « you can tweet an offensive opinion as long as you use polite language in doing so. »
Very British, en ce jour de Jubilé de la Reine d’Angleterre ?
Pas seulement : la décision du BTAS rappelle que l’intervention de l’autorité de contrôle dans l’exercice de la liberté d’expression de l’avocat est certes légitime, mais qu’il faut des motifs particulièrement sérieux pour la restreindre, et que la forme de l’expression est un critère crucial. Comme le dit Vanessa Reid, dans son commentaire, « Speech which offends but does not employ any insulting or inappropriate language is more likely to be found within the realm of acceptable conduct for a registered professional. » (Commentaire cité, ch. II)
En d’autres termes, de la tenue en toute chose, même quand on s’exprime sur les réseaux sociaux !
Me Philippe Ehrenström, avocat, LLM, CAS, Genève et Onnens (VD)