Parmi les règles professionnelles que doit respecter l’avocat, l’art. 12 let. c LLCA prévoit qu’il doit éviter tout conflit entre les intérêts de son client et ceux des personnes avec lesquelles il est en relation sur le plan professionnel ou privé.
L’interdiction de plaider en cas de conflit d’intérêts est une règle cardinale de la profession d’avocat. Elle est en lien avec la clause générale de l’art. 12 let. a LLCA – selon laquelle l’avocat exerce sa profession avec soin et diligence -, avec l’obligation d’indépendance figurant à l’art. 12 let. b LLCA, ainsi qu’avec l’art. 13 LLCA relatif au secret professionnel. Les règles susmentionnées visent avant tout à protéger les intérêts des clients de l’avocat, en leur garantissant une défense exempte de conflit d’intérêts. Elles tendent également à garantir la bonne marche du procès, en particulier en s’assurant qu’aucun avocat ne soit restreint dans sa capacité de défendre l’un de ses clients, respectivement en évitant qu’un mandataire puisse utiliser les connaissances d’une partie adverse acquises lors d’un mandat antérieur au détriment de celle-ci.
Selon la jurisprudence, les critères suivants peuvent permettre de déterminer l’existence ou non de mandats opposés dans un cas concret: l’écoulement du temps entre deux mandats, la connexité (factuelle et/ou juridique) de ceux-ci, la portée du premier mandat – à savoir son importance et sa durée -, les connaissances acquises par l’avocat dans l’exercice du premier mandat, ainsi que la persistance d’une relation de confiance avec l’ancien client (ATF 145 IV 218 consid. 2.1). Il faut éviter toute situation potentiellement susceptible d’entraîner des conflits d’intérêts. Un risque purement abstrait ou théorique ne suffit pas; le risque doit être concret. Il n’est toutefois pas nécessaire que le danger concret se soit réalisé et que l’avocat ait déjà exécuté son mandat de façon critiquable ou en défaveur de son client (ATF 145 IV 218 consid. 2.1).
L’incapacité de représentation affectant un avocat rejaillit sur ses associés (ATF 135 II 145 consid. 9.1). Le problème de la double représentation peut donc survenir quand les parties sont représentées par des avocats distincts, mais pratiquant dans la même étude, en qualité d’associés. L’interdiction des conflits d’intérêts ne se limite ainsi pas à la personne même de l’avocat, mais s’étend à l’ensemble de l’étude ou du groupement auquel il appartient. Sous cet angle, sont donc en principe concernés tous les avocats exerçant dans une même étude au moment de la constitution du mandat, peu importe leur statut (associés ou collaborateurs) et les difficultés que le respect de cette exigence découlant des règles professionnelles peut engendrer pour une étude d’une certaine taille (ATF 145 IV 218 consid. 2.2 et les références). Appelé à se prononcer sur le cas particulier du changement d’étude par un avocat collaborateur, le Tribunal fédéral a jugé que la connaissance par celui-ci, en raison de son précédent emploi, d’un dossier traité par son nouvel employeur constitue l’élément déterminant pour retenir la réalisation d’un conflit d’intérêts concret qui doit être évité, ce que permet la résiliation du mandat par le second (ATF 145 IV 218 consid. 2.3).
Dans le cas d’espèce, la cour cantonale a retenu un risque de collusion du fait que l’un des collaborateurs de l’Étude où exerçait actuellement Me C.________ avait travaillé sur les dossiers des époux et était ainsi susceptible de posséder des secrets obtenus dans le contexte de ses précédentes fonctions, rappelant néanmoins que le devoir de fidélité de l’avocat n’était pas limité dans le temps. Sans remettre en cause l’intégrité des précités, l’autorité cantonale a considéré qu’il existait ici concrètement la possibilité d’utiliser, consciemment ou non, des connaissances acquises sous couvert du secret professionnel, ce d’autant plus au regard de la connexité des procédures civiles et pénales, toutes liées à des aspects financiers; les procédures opposant les parties avaient par ailleurs toujours été portées jusqu’à la dernière instance cantonale, voir même, pour certaines, jusqu’au Tribunal fédéral, en sorte qu’il pouvait raisonnablement être retenu qu’elles avaient inévitablement marqué de leur empreinte l’esprit des avocats ayant eu à les traiter.
Admettant la sévérité de l’obligation imposée à l’avocat du recourant de mettre un terme à son mandat, la cour cantonale a néanmoins souligné que la bonne administration de la justice ainsi que l’intérêt de l’intimée à avoir une défense exempte de conflit d’intérêts primaient en l’occurrence le droit du recourant à se voir assister par l’avocat qu’il s’était désigné, le choix de ses futurs conseils lui étant au demeurant réservé. L’obligation de mettre un terme au mandat garantissait par ailleurs à l’avocat collaborateur de pouvoir concilier ses différentes obligations découlant tant de la LLCA que de son contrat de travail.
Les critiques que développe succinctement le recourant sont inaptes à retenir l’arbitraire de la décision cantonale. Admettant que Me H.________, ancien collaborateur de Me G.________ avait certes assisté celui-ci dans le cadre des dossiers pénaux occupant les parties, le recourant se borne essentiellement à affirmer que les précités ne se seraient jamais occupés des procédures civiles opposant les époux A.A.________ et B.A.________. C’est cependant sans réelle motivation qu’il tente d’invoquer l’absence de connexité entre les deux procédures, pourtant retenue par la cour cantonale en tant que celles-ci concernaient toutes des aspects financiers opposant les parties. Écarter le caractère marquant des procédures en cause en se limitant à lui opposer le volume des affaires traitées par les avocats concernés apparaît enfin appellatoire.
Le recourant achève ses critiques en concluant que le principe de proportionnalité serait « touché » dès lors qu’il serait privé de son droit de se faire assister par son avocat de choix, qui le suivait depuis cinq ans et qu’il serait contraint d’en trouver un autre, avec les conséquences financières qui en découleraient. Cet élément a clairement été pris en compte par l’autorité cantonale, qui lui a cependant préféré l’intérêt à une bonne administration de la justice ainsi que celui de l’intimée à obtenir une défense exempte de conflit d’intérêts, éléments d’appréciation que l’intéressé laisse cependant intacts.
Dépourvu de motivation efficace, le recours est irrecevable. Un délai au 1er mars 2023 est imparti au recourant pour désigner un nouveau conseil ou pour informer le tribunal s’il entend comparaître en personne.
(Arrêt du Tribunal fédéral 5A_761/2022 du 12 janvier 2023 consid. 3 et 4)
Me Philippe Ehrenström, avocat, LLM, CAS, Genève et Onnens (VD)