Le système de l’impôt à la source est défini aux art. 83 ss LIFD pour l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) et, s’agissant de l’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) aux art. 32 ss LHID notamment.
Le système d’imposition à la source a pour fonction de se substituer à l’ICC et à l’IFD perçus selon la procédure ordinaire.
Tant pour l’IFD que pour l’ICC, sont soumis à l’impôt à la source les travailleurs étrangers qui, sans être au bénéfice d’un permis d’établissement, sont, au regard du droit fiscal, domiciliés ou en séjour en Suisse (art. 83 al. 1 LIFD , art. 32 al. 1 LHID) ou ceux qui n’y sont pas domiciliés mais qui y exerce une activité de type dépendante (art. 91 LIFD, art. 35 al. 1 let. a LHID).
En matière d’IFD, selon l’art. 137 LIFD, lorsque le contribuable ou le débiteur d’une prestation imposable conteste le principe même ou le montant de la retenue d’impôt, il peut, jusqu’à la fin du mois de mars de l’année qui suit l’échéance de la prestation, exiger que l’autorité de taxation rende une décision relative à l’existence et l’étendue de l’assujettissement. Le délai à la fin du mois de mars suivant l’échéance de la prestation constitue en matière d’imposition fédérale un délai de péremption destinée à accroître la sécurité du droit.
La décision à requérir par le contribuable constitue une décision en constatation qui vise à renseigner l’administré, de manière obligatoire pour l’autorité, sur une situation de droit ou une interprétation ou une application éventuelle du droit. Le mécanisme de l’imposition à la source étant fondé sur le régime de l’auto-taxation, le délai de l’art. 137 LIFD a pour objectif de faire surgir rapidement les contestations éventuelles sur deux points seulement, à savoir sur le principe, ou sur le montant de la retenue d’impôt.
Selon l’art. 138 al. 2 LIFD, lorsque le débiteur de la prestation imposable a opéré une retenue d’impôt trop élevée, il doit restituer la différence au contribuable. Cette disposition est le pendant de l’art. 138 al. 1 LIFD qui prévoit, à l’inverse, qu’en cas de retenue d’impôt insuffisante, ledit débiteur peut être obligé à s’acquitter de l’impôt qui n’a pas été retenu, en ayant toutefois la possibilité de se retourner contre le contribuable. La LIFD ne prévoit aucun délai pour accomplir de telles démarches.
Selon l’art. 139 al. 1 LIFD, le contribuable peut former une réclamation à l’encontre de la décision de constatation émise en application de l’art. 137 al. 1 LIFD, comme de celles qui l’ont été en vertu de l’art. 138 al. 1 ou 2 LIFD.
Dans le canton de Genève, des règles en grande partie similaires à celles figurant aux art. 137 à 139 LIFD ont été adoptées conformément à l’art. 49 al. 2 LHID. Ainsi, l’art. 23 al. 1 LISP oblige le contribuable qui conteste son assujettissement à requérir une décision de l’autorité fiscale à ce propos dans le même délai que celui imposé par l’art. 137 al. 1 LIFD. En revanche, si le contribuable conteste le montant de la retenue d’un impôt, il doit élever réclamation avant le 31 mars si l’attestation contenant le montant d’un impôt retenu lui a été remise avant le dernier jour du mois de février ; si l’attestation lui a été délivrée plus tard, il doit le faire dans les trente jours suivant la date de cette remise, mais au plus tard le 31 décembre de l’année suivant celle pour laquelle l’impôt à la source a été retenu. Cette légère différence de traitement est autorisée par le fait que le terme au 31 mars figurant à l’art 137 al. 1 LIFD, n’a pas été repris à l’art. 49 LHID lors de l’adoption de cette norme.
De même, conformément aux art. 49 al. 3 et 4 LHID, les art. 21 al. 3 et 4 LISP prévoient des mécanismes réglant les situations dans lesquelles s’est produite une retenue d’impôt à la source insuffisante ou excédentaire. Ainsi, lorsque le débiteur de la prestation imposable a effectué une retenue trop élevée, le département peut l’obliger à restituer l’excédent au contribuable ; si la retenue a été versée ou si les relevés prévus à l’art. 18 al. 1 let. c LISP ont déjà été établis, le département restitue l’excédent au contribuable.
Le Tribunal fédéral dans l’ATF 135 II 274 précité a explicité les rapports existants entre les art. 137 et 138 LIFD respectivement les art. 32 et ss LHID et les dispositions de droit cantonal les mettant en application de manière harmonisée (en l’occurrence, il s’agissait des art. 209 et ss de la loi fiscale du canton du Tessin du 21 juin 1994, dont la teneur des art. 210 à 212 était calquée sur celle des art. 137 à 139 LIFD). Lesdits rapports devaient être interprétés de la manière suivante : le système de l’impôt à la source différait de celui de l’impôt ordinaire sur le revenu et la fortune par la mesure où il se fondait exclusivement sur une procédure d’auto-taxation. Le législateur avait imposé le respect d’un délai au 31 mars de l’année suivante pour requérir la décision de constatation de l’art. 137 al. 1 LIFD au cours des travaux législatifs, mais n’avait rien prévu à ce sujet, que ce soit à l’art. 138 LIFD à l’art. 49 al. 1 LHID ou à l’art. 49 al. 2 LHID.
Il était donc nécessaire d’examiner les conséquences dérivant de l’écoulement du délai prévu à l’art. 137 al. 1 LIFD ou par le droit cantonal appliquant l’art. 49 LHID, en distinguant les cas où une décision avait été rendue par l’autorité fiscale de ceux où aucun acte formel de ce genre n’avait eu lieu.
Si une telle décision avait été requise dans le délai, le prononcé y relatif, dans la mesure où il n’était pas attaqué, entrait en force. Cette décision pouvait concerner le principe même de l’assujettissement ou le montant de celui-ci, comme par exemple la question de savoir si un impôt perçu à la source sur la base du droit interne était légitime sous l’angle d’un accord de double imposition. Dans une telle situation, la chose jugée étant intervenue, les questions réglées dans la décision ne pouvaient plus être examinées que si les conditions d’une révision au sens des art. 147 et suivants LIFD ou au sens du droit cantonal étaient réalisées, respectivement celle d’un rappel d’impôt (consid. 5.1).
Dans l’hypothèse où le contribuable ou le débiteur de la prestation imposable n’avait pas demandé une telle décision dans le délai prescrit, soit avant la fin du mois de mars suivant l’échéance des prestations, tant l’un que l’autre ne pouvait plus émettre de contestation sur le principe de l’assujettissement fiscal. En revanche, il leur restait la possibilité de critiquer la somme de la retenue d’impôt. Une telle solution s’imposait dans la mesure où il n’était pas justifié, en matière d’impôt à la source, d’assimiler le taux de la taxation à une décision entrée en force. Il n’y avait pas lieu de traiter plus favorablement le fisc que le contribuable. En l’absence de décision fondée sur l’art. 137 LIFD ou sur la disposition similaire de droit cantonal, il demeurait ainsi la possibilité de critiquer la somme de la retenue d’impôt, et cela soit en faveur du fisc, soit en faveur du contribuable. L’art. 138 LIFD ou la disposition de droit cantonal correspondante devaient ainsi être considéré comme des lex specialis par rapport à l’art. 137 LIFD ou à la disposition de droit cantonal qui en reprenait la teneur limitée aux problèmes qui se posaient dans le cas d’une retenue excessive ou insuffisante. L’art. 138 al. 2 LIFD ou une disposition équivalente du droit cantonal permettait à l’administration et au contribuable d’exiger de manière simplifiée, même après l’échéance du délai, le paiement, respectivement la restitution des impôts à la source retenus. Cette interprétation s’imposait au regard du titre marginal de l’art. 138 LIFD (« paiement complémentaire et restitution d’impôt ») et au regard du contenu de l’art. 16 de l’ordonnance sur l’imposition à la source du 19 octobre 1993 (OIS – RS 642.118.2) (consid. 6. 3).
Le Tribunal fédéral a confirmé le principe précité dans trois arrêts ultérieurs (arrêt du Tribunal fédéral 2C_168/2014 du 29 octobre 2014 consid. 4.2 ; 2C_684/2012 du 5 mai 2013 consid. 5.1 ; 2C_601/2010 du 21 décembre 2010 consid. 2.2), avec toutefois des solutions différentes.
Dans l’ATF 135 II 274 comme dans l’arrêt 2C_601/2010 précités, il a admis le recours du contribuable. Celui-ci, formé en l’absence de toute requête à l’autorité fiscale basée sur l’art. 137 al. 1 LIFD, était fondé sur le fait que le débiteur de la prestation avait retenu un montant de l’impôt à la source trop élevé en se trompant de taux ou de barème.
En revanche, dans son arrêt 2C_684/2012 du 5 mai 2013 précité, il a rejeté le recours d’un contribuable qui demandait la rectification d’une imposition à la source pour tenir compte des pensions alimentaires qu’il avait versées à son ex-épouse et à sa fille. Dans une telle situation, le contribuable qui entendait faire valoir des déductions supplémentaires non prévues dans le barème devait respecter le délai mentionné à l’art. 137 al. 1 LIFD. En effet, on ne pouvait pas assimiler un tel contribuable à une victime du système de l’auto-taxation, à l’instar de celui qui se voit appliquer un barème ou un taux d’imposition erroné par son employeur. Celui qui entendait faire valoir des déductions supplémentaires était tenu à un comportement actif personnel car l’employeur ne pouvait procéder lui-même aux corrections nécessaires. Il devait s’adresser lui-même à l’autorité fiscale pour demander que de telles déductions, qui dépassaient les montants forfaitairement inclus dans le barème d’imposition de l’art. 86 LIFD, soit prises en considération. Il y avait lieu de distinguer entre la situation d’un contribuable se voyant appliquer un barème, ou dont l’imposition était erronée en raison d’une inadvertance de son employeur, alors que son revenu avait été déterminé de façon exacte en tenant compte des déductions forfaitaires des charges de famille, et celle d’un contribuable pour lequel l’employeur avait appliqué le barème exact au revenu déterminé selon des critères ordinaires et dans lequel c’était le contribuable lui-même qui revendiquait des déductions supplémentaires que seule l’administration fiscale pouvait effectuer. Dans un tel cas, il lui appartenait de faire preuve de diligence et de déposer sa demande dans le délai prévu par l’article 137 LIFD. À défaut, il était forclos.
Enfin, dans l’arrêt 2C_168/2014, il a admis le recours de l’autorité fiscale parce que la retenue à la source ne résultait pas de la seule procédure d’auto-taxation. Le contribuable, qui avait sollicité la prise en compte de déductions supplémentaires, avait fait l’objet de décisions de l’autorité fiscale suite à une requête fondée sur les art. 137 al. 1 LIFD et 23 al. 1 LISP qui étaient en force. Dès lors, le contribuable ne pouvait plus faire valoir d’autres déductions par le biais de demandes fondées sur les art. 138 LIFD et 21 LISP.
Dans un autre cas jugé par la Chambre administrative de la Cour de justice (ATA/1164/2015), le contribuable, même autorisé à travailler à Genève en tant que ressortissant d’un pays signataire de l’ALCP, n’était pas domicilié à Genève au plan fiscal. Il n’était dès lors pas soumis à un assujettissement fiscal illimité en Suisse ou dans le canton de Genève, mais n’y était imposé qu’en fonction d’un rattachement personnel au sens des art. 3 al. 1 et 2 LIFD ou 3 al. 1 LHID et 2 al. 1 à 3 LIPP ou 2 al. 1 à 3 aLIPP-I, lié au seul exercice d’une activité lucrative en Suisse (art. 6 al. 1 LIFD ou 4 LHID et 3 al. 2 aLIPP ou 3 al. 2 LIPP).
Il ressort des pièces de la procédure que le contribuable était également imposé en Allemagne où il résidait avec son épouse et qu’il n’était assujetti à l’impôt en Suisse qu’en fonction du seul rattachement économique représenté par son activité lucrative dépendante. Dans ces circonstances, c’est en conformité des art. 91 al. 1 LIFD et 7 LISP que, tant pour l’IFD que pour l’ICC, le revenu qu’il a perçu à Genève a fait l’objet d’une imposition à la source.
En l’occurrence, il n’était pas contesté que, dans le cadre de la procédure de taxation à la source dont il a fait l’objet durant l’exercice fiscal 2010, le contribuable n’a jamais entrepris de démarches auprès avant le 31 mars 2011 pour contester le montant de son imposition à la source. Le respect du délai de l’art. 137 al. 1 ou celui de l’art. 23 al. 1 LISP étant dicté par la loi, il s’impose, comme tout délai légal, à tous les contribuables (art. 15 al. 1 LPA et 22 al. 1 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 – PA – RS 172.021) quelle que soit son adéquation et les critiques que le recourant peut formuler à son encontre, si les cas de force majeure sont réservés, soit des circonstances échappant au contrôle du contribuable et qui en autoriseraient la restitution. De telles circonstances ne sont pas – à juste titre – invoquées par le recourant qui ne se trouvait pas dans une telle situation, au vu de ce qu’il expose.
Le délai de réclamation étant dépassé pour exiger, en vertu des art. 137 al. 1 ou 23 al. 1 LISP que l’autorité fiscale statue sur l’existence ou l’étendue de son assujettissement, seule une action en restitution fondée sur les art. 138 LIFD ou 23 al. 2 LISP n’étant encore possible, il s’agit dès lors de qualifier la nature des prétentions qu’il a émises le 21 août 2012 pour déterminer si sa démarche peut s’inscrire dans ce dernier cadre, ainsi que le TAPI en a jugé.
En l’espèce, l’intimé se plaint non pas de ce que son employeur ait appliqué un mauvais barème ou un taux inexact, mais d’avoir fait l’objet d’une retenue d’impôt trop importante, parce que portant sur des revenus non soumis à retenue en Suisse puisqu’ils se rapportent à une activité déployée à l’étranger et qu’il n’était pas un contribuable assujetti de façon illimitée en Suisse. Il rappelait être soumis aux dispositions de la CDI – RFA, et être imposé dans cet État pour la partie des activités professionnelles qu’il y avait déployée, si bien qu’il devait se voir restituer le montant perçu par la recourante afférant à tout revenu lié à une activité non déployée en Suisse.
Le contribuable ne peut être suivi dans ses prétentions. En effet, la problématique sur la base de laquelle il fonde ses prétentions relève d’une question d’assujettissement fiscal, du type de celle que le Tribunal fédéral avait citée à titre d’exemple dans son arrêt du 9 février 2009 (ATF 135 II 274 consid. 5.1). Il s’agit de déterminer le lieu où un élément imposable doit être taxé au regard des dispositions d’une convention de double imposition. Or, à teneur tant de l’art. 137 al. 1 LIFD que de l’art. 23 al. 1 LISP, pour régler une question de cette nature, tout contribuable soumis à l’impôt à la source se doit de solliciter une décision constatatoire tranchant la question de cet assujettissement avant le 31 mars de l’année suivant l’échéance de la prestation. N’ayant pas accompli cette démarche pour l’exercice fiscal 2010 dans le délai précité, le contribuable n’est plus en droit de réclamer la restitution de tout impôt à la source qui lui aurait été retenu de manière excessive, au motif qu’il se rapporterait à un revenu obtenu à l’étranger.
Le contribuable, confirmé en cela par le TAPI, se tient pour une « victime de la procédure d’auto-taxation » découlant des modalités de perception de l’impôt à la source. Ce point de vue ne peut être suivi. En effet, contribuable dans un autre État, il était à même de déceler par lui-même le risque d’une double imposition. S’il appartient à l’employeur, débiteur de l’impôt à la source de retenir les montants nécessaires sur les sommes soumises à l’impôt à la source selon le droit suisse aux fins de s’acquitter de ses obligations fiscales, on ne peut exiger de l’employeur qu’il se livre, dans le cadre de la procédure d’auto-taxation, à une analyse juridique de la situation du sujet fiscal sous l’angle d’une éventuelle double imposition. C’est en effet ce dernier qui dispose des informations qui lui permettaient d’intervenir pour obtenir, dans le délai légal, une décision réglant précisément la question du montant de ses revenus assujettis.