Coronavirus, libertés et protection des données

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J’avais, dans une note du 23.11.2020, traité de l’obligation de vacciner les salariés, le tout étant assorti d’un gros point d’interrogation. Il était dit en substance que l’art. 22 de la loi fédérale du 28 septembre 2012 sur la lutte contre les maladies transmissibles de l’homme (Loi sur les épidémies, LEp ; RS 818.101) prévoyait certes que les « (…) cantons peuvent déclarer obligatoires des vaccinations pour les groupes à risques, pour les personnes particulièrement exposées et pour les personnes exerçant certaines activités, pour autant qu’un danger sérieux soit établi», mais que cette obligation n’était assortie d’aucune contrainte directe. La LEp prévoyait toutefois des moyens de contrainte indirecte, une fois l’obligation vaccinale décrétée dans certaines circonstances ou pour certaines professions. En effet, les récalcitrants pouvaient être restreints dans l’accès à certaines professions ou interdits de certaines activités (art. 38 LEp) ou mis en quarantaine ou à l’isolement (art. 35 LEp). Il était aussi traité de la question du droit au salaire des récalcitrants une fois l’obligation mise en œuvre. (Cf.https://droitdutravailensuisse.com/2020/11/23/la-vaccination-obligatoire-des-salaries-public-cible-moyens-de-contrainte/)

Depuis la mise en ligne de cette note, on a entendu beaucoup de choses sur la contrainte « par privation de services », i.e. le fait de réserver certains biens ou prestations ou personnes qui seraient vaccinées – transport, évènements publics, festivals, etc. Ces prises de position sont assez diverses en intérêt et qualité. On mentionnera un politicien ex-jeune loup prometteur qui entendait réserver certains avantages indéfinis aux vaccinés (par opposition aux « bombes bactériologiques » – sic ! 24 heures, mardi 22 décembre 2020), un projet de loi en France prestement déposé et tout aussi rapidement retiré (Cf. https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b3714_projet-loi et https://www.lefigaro.fr/politique/covid-19-ce-que-contient-le-controverse-projet-de-loi-instituant-un-regime-perenne-des-urgences-sanitaires-20201222), une obscure juriste de la Confédération expliquant que les « privés » pouvaient faire ce qu’ils voulaient en la matière (24 Heures, 28.12.2020), les velléités d’organisateurs de grands festivals souhaitant imposer (ou non : c’est peu clair) un passeport vaccinal pour qui voudrait participer à leurs raouts (ibidem) , etc.

C’est dire s’il est heureux de lire dans le Blick du 28 décembre 2020 une interview du Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PFPDT), Adrien Lobsiger, qui remet certaines pendules à l’heure (cf. https://www.blick.ch/politik/datenschuetzer-adrian-lobsiger-airlines-koennen-keine-impfausweispflicht-einfuehren-id16266287.html).

Toute l’interview est à lire, évidemment. Le PFPDT insiste particulièrement sur la responsabilité de l’autorité politique. Il appartient au législateur, et non aux acteurs privés, de déterminer si des restrictions aux libertés des uns et des autres peuvent être mises en œuvre en raison de la pandémie. Ce n’est pas aux acteurs économiques de déterminer, dans le plus grand désordre, ce qui peut être octroyé ou non et à qui pour ces raisons. Cela poserait d’ailleurs des questions de discrimination et de proportionnalité évidentes, mais aussi des problèmes en rapport avec le droit sur la protection des données. Un citoyen ne peut ainsi pas déléguer à un autre le traitement de ses données médicales pour pouvoir accéder à tel ou tel bien ou à tel service.

Extraits :

«Wichtig ist hier der Wille des Gesetzgebers: Die Swiss-Covid-App ist so freiwillig wie die Impfung. Das ist im Epidemiengesetz so geregelt. Private Unternehmen sollen nicht eigenmächtig verlangen, dass alle Kunden ein Smartphone mit Gesundheitsdaten, wie zum Beispiel einen digitalen Impfausweis, vorweisen – etwa um in einen Betrieb zu gelangen.

Wieso nicht? Gewisse Branchen überlegen sich ja bereits eine Impfpflicht für Kunden.

Seuchenbekämpfung ist Aufgabe des Staates und nicht von Privaten. Unternehmen sollen die politischen Vorgaben und Sicherheitskonzepte umsetzen. Wenn der Gesetzgeber sagt, es kommt niemand in ein Flugzeug oder in ein Restaurant ohne Impfausweis, dann ist das ein politischer Entscheid.

Es gilt doch auch die Wirtschaftsfreiheit, da soll doch jedes Unternehmen selber entscheiden, mit wem es geschäften will.

So einfach ist das nicht. Natürlich können eine Fluggesellschaft oder ein Beizer jemanden abweisen, weil er andere Gäste stören könnte. Aber sie können keine systematische Handytragpflicht oder digitale Impfausweispflicht einführen.

Es wäre also unzulässig, wenn ein Wirt nur Gäste ins Restaurant lässt, die eine Corona-Impfung vorweisen können?

Ich bin der Meinung, dass das gegen das Datenschutzgesetz verstossen würde. Die Bürger dürfen nicht einer Beschaffung und Bearbeitung von Gesundheitsdaten durch andere Bürger ausgesetzt werden. Ohne gesetzliche Vorgaben geht das nicht! Umso wichtiger ist es deshalb, dass der Staat regelt, welche Impf- oder Testdaten private Unternehmen wie bearbeiten sollen.

(…)

Grundsätzlich wären aber Impfprivilegien möglich, wenn der Bund diese regelt? So könnten Geimpfte zum Beispiel ohne Einschränkungen kulturelle oder sportliche Anlässe besuchen.

Solche Regelungen könnten vorsehen, dass der Zugang zu gewissen Dingen von Impf- oder Testausweisen abhängt. Es ist nicht an mir zu beurteilen, wann das nötig ist. Es gibt aber Fragen der Diskriminierung. (…)  Gibt es Alternativen?

(…)

Es liegt nicht an der Datenschutzbehörde, die Abwägung zwischen Pandemierisiken und Datenschutzeinschränkungen zu machen. Das war ein politischer Entscheid. Wir beurteilten nur, ob der Datenschutz den gesetzlichen Vorgaben entspricht.

(…)

Wenn der Gesetzgeber sagt, dass man die Seuchenlage anders nicht in den Griff bekommt und die politische Diskussion im Parlament geführt wurde, ist es nicht am Datenschutz zu sagen, wie man Seuche und Freiheit gegeneinander abwägen muss. Für mich ist einfach wichtig, dass das nicht ein Bundesamt entscheidet.

Selbst ein App-Zwang wäre kein Problem?

Die jetzige Lösung ist das Ergebnis einer politischen Diskussion. Im Nachhinein kann man sagen, dass man sich mehr User gewünscht hat. Trotzdem muss man sich immer fragen, wie sich ein App-Zwang langfristig auswirken würde. Damit ginge eine Handytragpflicht einher – und dann wäre es nur ein kleiner Schritt, dass das Handy plötzlich zum «sozialen Pass» für alles Mögliche würde. Etwa, in welchem Sektor man sich bei einem Lockdown noch bewegen darf. Oder zur Kontrolle einer Homeoffice-Pflicht. Überwachung und Diskriminierung würden damit Tür und Tor geöffnet.

(…)

Ich sehe schon ein Risiko, dass uns die Pandemie in ein «Schöne neue Welt»-Szenario schubsen könnte. (…)»

Les propos d’Adrien Lobsiger sont clairs, nets et sans détours; ils constituent une boussole bienvenue dans des temps de confusion intellectuelle.

On aurait aimé les lire dans la presse romande dite « de qualité », qui se gausse tant de la presse dite « de boulevard » alémanique. Mais le sujet de cette note n’est pas la qualité comparée de l’information en Suisse romande et en Suisse alémanique (il y aurait tant à dire,,,).

Me Philippe Ehrenström, LL.M., avocat, Genève et Onnens (VD)

A propos Me Philippe Ehrenström

Ce blog présente certains thèmes juridiques en Suisse ainsi que des questions d'actualité. Il est rédigé par Me Philippe Ehrenström, avocat indépendant, LL.M. (Tax), Genève et Yverdon.
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