A teneur de l’art. 336 al. 1 let. b CO, le congé est abusif lorsqu’il est donné par une partie en raison de l’exercice, par l’autre partie, d’un droit constitutionnel, à moins que l’exercice de ce droit ne viole une obligation résultant du contrat de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l’entreprise.
La notion d’« exercice d’un droit constitutionnel » doit s’interpréter de manière restrictive, sans quoi presque tous les licenciements pourraient être qualifiés d’abusifs. En effet, les droits constitutionnels couvrent à peu près tous les aspects de la vie professionnelle et privée.
L’art. 336 al. 1 let. b CO vise, notamment, dans les droits protégés, la liberté de croyance, visée par l’art. 15 de la Constitution fédérale.
Il faut, dans l’application de l’art. 336 al. 1 let. b CO, mettre à part les Tendenzbetrieb, soit les entreprises à fortes orientations politiques ou religieuses, qui peuvent imposer à leurs employés de plus fortes restrictions à la liberté de croyance (ATF 130 III 699). On peut ainsi aisément comprendre qu’une église chrétienne puisse licencier un homme d’église qui se convertirait ou qui embrasserait l’athéisme. Cela ne concerne toutefois que des cas très peu nombreux.
Le mécanisme de l’art. 336 al. 1 let. b CO est donc à deux temps : le licenciement prononcé en vertu de l’exercice d’un droit constitutionnel, comme la liberté de croyance, est abusif (principe), sauf si l’exercice de ce droit (i) viole une obligation résultant du contrat de travail ou (ii) porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l’entreprise (faits justificatifs). Il faut également souligner que le devoir de fidélité de l’employé (art. 321a CO) restreint par nature l’exercice des droits constitutionnels du salarié.
La doctrine cite le cas de l’employé qui est licencié parce qu’il n’accepte pas de travailler un certain jour de la semaine pour des raisons religieuses. Le licenciement serait en principe admissible, dans la mesure où l’intéressé ne pourrait remplir ses obligations contractuelles de manière significative, mais il serait abusif si l’employeur avait en fait la possibilité effective de répartir le travail du salarié sur les autres jours restants. (SUBILLIA/DUC, Droit du travail, Lausanne, 2010, p. 559 N 25)
On peut rapprocher cet exemple d’une décision cantonale portant sur l’art. 328 CO. La mise en place d’un horaire continu pour les employés musulmans pendant la durée du Ramadan avait en effet été contestée par une employée non musulmane, laquelle y voyait une discrimination à son égard violant l’art. 328 al. 1 CO. La Cour d’appel de la Juridiction des prud’hommes du canton de Genève a, en 2006, écarté ce grief au motif que la différence de traitement qui résultait de cet horaire spécial appliqué aux employés musulmans reposait sur un motif justifié, ce qui excluait toute discrimination. (CAPH/200/2006)
A été également jugé abusif le congé donné à une travailleuse qui portait le foulard islamique et exerçait ainsi sa liberté de croyance et de conscience. L’existence d’une directive interne de l’entreprise interdisant le port du foulard n’a pas été jugée pertinente dans la mesure où deux autres employées portaient ledit foulard sans être inquiétées, ce qui revient à commettre une inégalité de traitement que ne sauraient justifier de longues années de service. (JU-TRAV 1991 p. 23)