Par le contrat individuel de travail, le travailleur s’engage, pour une durée déterminée ou indéterminée, à travailler au service de l’employeur et celui-ci à payer un salaire fixe d’après le temps ou le travail fourni (art. 319 al. 1 CO). Les éléments caractéristiques de ce contrat sont donc une prestation de travail, un rapport de subordination, un élément de durée et une rémunération.
Aucun de ces critères pris isolément n’est déterminant. Le lien de subordination qui permet de différencier en particulier le contrat de travail du contrat de mandat, constitue un critère distinctif essentiel. Le travailleur est placé dans la dépendance de l’employeur sous l’angle personnel, fonctionnel, temporel et dans une certaine mesure économique. Le travailleur est assujetti à la surveillance, aux ordres et instructions de l’employeur. Il est intégré dans l’organisation de travail d’autrui et y reçoit une place déterminée.
Le lien de subordination peut connaître des variations de degrés en fonction des différentes situations d’emploi.
Ainsi, le degré de dépendance peut varier à l’intérieur même du rapport de subordination : à titre d’exemple, les cadres dirigeants peuvent se voir reconnaître une large autonomie dans l’organisation de leur travail. Il faut alors apprécier la situation en se fondant sur l’image globale que présente l’intégration du prestataire de service dans l’entreprise. L’indépendance de l’employé est beaucoup plus grande et la subordination est alors essentiellement organisationnelle. Dans un tel cas, plaident notamment en faveur du contrat de travail la rémunération fixe, périodique, la mise à disposition d’une place de travail ou encore des outils de travail.
Sous l’angle de la rémunération, le contrat de travail se distingue des autres contrats voisins par le fait que la rémunération d’un entrepreneur ou un mandataire rétribue l’ouvrage ou l’activité même et non pas seulement la mise à disposition du temps. La soumission de la rémunération aux charges sociales n’est pas un élément déterminant dans la qualification d’une relation contractuelle.
En l’espèce, les parties divergent sur la nature de leur relation contractuelle, en particulier sur l’existence ou non d’un lien de subordination entre elles, l’appelant considérant que l’intimée était indépendante et celle-ci affirmant être employée. Dès lors, une commune et réelle intention des parties ne ressort pas de leurs déclarations.
Les huit années d’activité de l’intimée au sein du foyer de l’appelant peuvent être divisées en trois périodes. D’août 2005 à octobre 2009, l’intimée s’occupait des enfants, ces derniers n’allant pas à la crèche ou à l’école maternelle. Elle prenait en charge les repas, les activités, comme la lecture ou les promenades. D’octobre 2009 à février 2011, les enfants n’étaient plus présents à Genève, toutefois l’intimée a maintenu une activité auprès de l’appelant, consistant à l’aider dans l’apprentissage du français et à effectuer des tâches ménagères. Dès le retour des enfants en Suisse, elle allait les chercher à la sortie de l’école à 16h00, préparait le repas du soir et des activités, et s’occupaient d’eux toute la journée du mercredi.
Ainsi, les tâches de l’intimée ont évolué avec le temps et n’étaient pas exclusivement dévolues aux enfants, de sorte qu’elle n’a pas été mandatée pour l’éducation de ces derniers, mais œuvrait en qualité de soutien et aide domestique. Elle exerçait son activité en fonction des besoins de la famille : c’est donc sur la base des instructions de l’appelant que ses tâches étaient déterminées. Il en va de même pour ses horaires, l’appelant fixait notamment les week-ends où l’intimée devait prendre en charge les enfants. En outre, ce dernier a mis à sa disposition une voiture, pour qu’elle puisse aller chercher les enfants à la sortie de l’école. Le fait que cette dernière disposait d’une grande autonomie dans l’organisation des journées, et qu’elle n’était pas soumise à une réelle surveillance de l’appelant, ne change rien au fait que ce dernier l’instruisait sur les tâches à accomplir selon ses propres besoins et ceux des enfants, et que ses horaires de travail, dépendant des besoins de la famille, lui étaient imposés.
La rémunération de l’intimée était fixée au taux horaire de 25 fr. Son revenu mensuel a varié en fonction des trois périodes précitées, soit en fonction des besoins de la famille, et partant, du temps qu’elle devait mettre à leur disposition. L’existence de factures, sur la base desquelles l’intimée était rémunérée par la succursale genevoise de […] n’établit pas que cette dernière exerçait en qualité d’indépendante. (…) Il en va de même du remboursement des frais afférents aux enfants (…).
Le seul fait qu’aucune charge sociale n’ait été déduite de son revenu n’est pas déterminant pour établir si l’intimée était ou non indépendante. (…)
Il s’agit d’autant d’indices attestant de l’existence d’un contrat de travail entre les parties.
(CAPH/166/2015, consid. 3)