[Dans la mesure où nous recevons beaucoup de questions de clients sur l’état de fait exceptionnel entraîné par la présente épidémie de Covid-19, il nous a paru utile de partager quelques éléments de réponse. Il va sans dire que ces considérations ne remplacent pas une analyse au cas par cas, et ne sauraient constituer un avis de droit susceptible d’engager la responsabilité de leur auteur.]
L’employeur doit-il recenser les personnes à risque ?
La réponse est clairement positive.
L’art. 328 al, 2 CO oblige l’employeur à prendre toute mesure utile, adéquate et proportionnée pour protéger la santé de ses employés. Or il apparaît aujourd’hui qu’il y a une surmortalité chez certains types de patients, ce qui implique qu’il faut connaître les employés concernés pour prendre des mesures d’organisation et de protection spécifiques les concernant (télétravail, isolement, interdiction de fréquenter les parties communes, etc.)
Le site de l’OFSP (https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/krankheiten/ausbrueche-epidemien-pandemien/aktuelle-ausbrueche-epidemien/novel-cov/besonders-gefaehrdete-menschen.html) définit les « personnes particulièrement à risque » notamment comme celles souffrant de : cancer ; diabète ; faiblesse immunitaire due à une maladie ou à une thérapie ; hypertension artérielle ; maladies cardio-vasculaires ; et maladies chroniques des voies respiratoires.
On devrait ajouter à ces personnes celles qui vivent en ménage commun avec les « personnes particulièrement à risque ».
L’employeur devrait donc pouvoir demander aux employés s’ils font partie des « personnes particulièrement à risque » ou s’ils vivent avec de telles personnes. Une telle collecte de données peut toutefois excéder les motifs justificatifs de l’art. 328 b CO et être potentiellement illicite. Elle peut aussi susciter des craintes quant à la conservation de ces données et leur usage ultérieur.
L’employeur devrait donc informer les travailleurs du but et de la finalité de cette collecte de données (i.e. protéger les personnes à risque et leurs proches en vertu de l’art. 328 al. 2 CO), indiquer que ces données ne seront traitées qu’à cette fin et qu’elles seront retirées du dossier personnel après un certain délai et enfin requérir le consentement explicite des travailleurs au traitement de données.
Il serait probablement préférable de désigner un responsable au sein de l’employeur de ce traitement de données exceptionnel, de l’instruire au sens de ce qui précède et de prévoir que les données seront séparées du dossier personnel « ordinaire » et accessibles seulement à un nombre restreint de personnes.
Bon courage !
Me Philippe Ehrenström, LL.M, avocat, Genève et Onnens (VD)