Remboursement de frais de formation supportés par l’employeur

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L’appelante conteste devoir rembourser les frais de sa formation MBA à l’intimée, dans la mesure où, d’une part, cette dernière a exigé que le mémoire s’inscrive dans ses intérêts et, d’autre part, l’appelante a résilié le contrat en raison d’un burn-out causé par le rythme de travail imposé par l’intimée.

L’employeur rembourse au travailleur tous les frais imposés par l’exécution du travail (art. 327a al. 1 CO).

S’agissant des frais de formation, il convient de distinguer entre la formation qui sert uniquement au travailleur à se familiariser avec son travail au sein de l’entreprise (« Einarbeitung » ou « Einbildung ») et la formation complémentaire procurant au travailleur un avantage personnel perdurant au-delà des rapports de travail et pouvant être exploité sur le marché du travail (« Ausbildung » ou « Weiterbildung »). Les frais liés au premier type de formation sont des « frais imposés par l’exécution du travail » au sens de l’art. 327a al. 1 CO, ce qui n’est pas le cas des frais liés au second type de formation. Dans ce dernier cas, l’employeur ne doit les supporter que si un accord le prévoit. Le cas échéant, l’employeur peut subordonner la prise en charge des frais à une obligation de remboursement du travailleur en cas de fin des rapports de travail avant l’échéance d’une certaine durée à compter du terme de la formation, qui ne devrait pas dépasser trois ans.

Selon la jurisprudence de la Chambre des prud’hommes du canton de Genève, l’art. 340c al. 2 CO – lequel prévoit qu’une prohibition de faire concurrence cesse si l’employeur résilie le contrat sans que le travailleur lui ait donné un motif justifié – doit être appliqué par analogie aux clauses de remboursement de frais de formation (arrêt CAPH/86/2016 du 11 mai 2016 consid. 4.1.2). Il doit en aller de même lorsque le travailleur résilie le contrat de travail pour un motif dont l’employeur doit répondre. Devant le Tribunal fédéral, la question de l’application par analogie de l’art. 34c al. 2 CO reste indécise (arrêt du Tribunal fédéral 4A_90/2009 du 25 septembre 2009 consid. 3).

En l’espèce, le Tribunal a retenu que la convention de formation liant les parties était valable, l’appelante ( = l’employée) elle-même ayant souligné qu’il s’agissait d’une opportunité et s’étant prévalue de son titre dans ses recherches d’emploi. Les faits avancés par l’appelante, à savoir que son travail de mémoire aurait été rédigé dans l’intérêt de l’intimée, ne l’empêchent pas d’exploiter ce titre sur le marché du travail et d’en tirer un avantage perdurant au-delà des rapports de travail liant les parties.

Quant à l’éventuelle caducité de l’accord, l’instruction n’a pas permis d’établir que le départ de l’appelante aurait été motivé par une surcharge de travail chronique imputable à l’intimée. Les faits que l’appelante allègue à cet égard dans son appel ne justifient pas de revenir sur le constat du Tribunal à cet égard. En effet, quand bien même les différents témoignages mis en avant attestent d’une charge de travail importante reposant sur les épaules de l’appelante et d’une certaine fatigue – qui peut toutefois aussi résulter du cumul d’un emploi à 100% et de la formation de l’appelante -, l’existence d’un épuisement dû à un stress chronique imputable à l’employeur n’est pas établie. L’arrêt de travail du 17 au 24 mars 2020 semble être en relation avec un événement ponctuel survenu le dimanche précédent, dont on ne sait pas s’il est en relation avec le travail. Cet arrêt semble être au surplus une occurrence unique à laquelle F______ a réagi en recommandant à l’appelante de prendre quelques jours de vacances. Par ailleurs, selon ses notes, le médecin de l’appelante n’a pas constaté de burn-out, bien qu’il ait examiné cette question (« burn out-na »). Enfin, comme l’a retenu le Tribunal, l’intimée n’a pas formulé de plaintes à cet égard au moment de la résiliation de son contrat de travail.

Dès lors, l’appelante ne saurait s’opposer au remboursement des frais de formation exigé par l’intimée. L’appel sera rejeté sur ce point.

(Arrêt de la Chambre des prud’hommes de la Cour de justice du canton de Genève CAPH/5/2021, consid. 6)

Me Philippe Ehrenström, LL.M., avocat, Genève et Onnens (VD)

A propos Me Philippe Ehrenström

Ce blog présente certains thèmes juridiques en Suisse ainsi que des questions d'actualité. Il est rédigé par Me Philippe Ehrenström, avocat indépendant, LL.M. (Tax), Genève et Yverdon.
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