Licenciement abusif : exemple de calcul de l’indemnité

pexels-photo-210600.jpegSelon l’art. 336a al. 1 CO, la partie qui résilie abusivement le contrat doit verser à l’autre une indemnité. Selon l’al. 2 de cette disposition, l’indemnité fixée par le juge compte tenu de toutes les circonstances; toutefois elle ne peut dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur.

Le juge dispose d’un large pouvoir d’appréciation en la matière. Il doit notamment tenir compte de la gravité de la faute de l’employeur, de la gravité de l’atteinte à la personnalité du travailleur, de l’intensité et de la durée des rapports de travail, des effets économiques du licenciement, de l’âge et de la situation personnelle du travailleur, des conditions existantes sur le marché du travail, de la situation économique des parties et d’une éventuelle faute concomitante du travailleur (ATF 123 111 255; 119 II 161).

La recourante ( = l’employeuse) critique essentiellement le fait que le Tribunal ait retenu contre elle une politique discriminatoire envers les collaboratrices ayant eu des grossesses dans le cadre de la fixation de l’indemnité. Quant à lui, le Tribunal avait retenu, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation pour fixer le montant de l’indemnité, d’une part, que le licenciement était abusif tant au fond qu’à la forme, et qu’il avait eu un impact économique négatif sur la demanderesse et sa famille, celle-ci n’ayant retrouvé un poste qu’à 40% à l’issue de son instruction. Il a par ailleurs retenu un impact sur la santé psychologique de l’intimée, le licenciement ayant entraîné une incapacité de travail totale pendant un mois.

Même si la Cour ne retient pas expressément l’existence d’une « politique » de l’appelante visant la cessation des rapports de travail avec les femmes ayant eu des grossesses, force est d’admettre que le déroulement des faits ayant abouti à la mise à pied injustifiée de l’intimée constitue une faute importante de l’employeuse. Il n’est pas contesté que cette faute a abouti à ce que cette dernière subisse un impact économique négatif ainsi qu’un impact sur sa santé psychologique. La Cour relève à ce stade que la durée des rapports de travail avec l’intimée a été de cinq ans, que celle-ci donnait pleine satisfaction et avait des rapports cordiaux tant avec ses collègues qu’avec son directeur. Il ressort également du dossier que l’employée se consacrait pleinement à son travail, l’appelante lui ayant confié régulièrement des responsabilités croissantes ainsi que deux augmentations de revenus. L’intimée n’avait dès lors aucune raison d’envisager qu’elle puisse être licenciée. L’on ne peut retenir à son égard d’autre part aucune faute concomitante.

Enfin, la Cour partage l’analyse du Tribunal quant à la manière abusive dont le congé a été donné. En effet, alors que pendant son congé maternité et en vue de l’organisation de la reprise de son travail, l’employée avait proposé une reprise à temps partiel admise sur le principe par l’employeur, celui-ci l’a convoquée pour « discuter de son contrat » à une séance lors de laquelle celle-ci a été licenciée. Cette manière de procéder, qualifiée à juste titre de duplicité par le Tribunal, confirme également un comportement abusif.

Il en découle que l’indemnité de cinq mois de salaire fixée par le Tribunal pour licenciement abusif peut être confirmée.

(CAPH/200/2017, consid. 5)

Me Philippe Ehrenström, LL.M., avocat, Genève et Yverdon

A propos Me Philippe Ehrenström

Ce blog présente certains thèmes juridiques en Suisse ainsi que des questions d'actualité. Il est rédigé par Me Philippe Ehrenström, avocat indépendant, LL.M. (Tax), Genève et Yverdon.
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